Brésil
La canne à sucre détruit notre vie
Paixao de Jesus Santo est un paysan brésilien. Vous pouvez entendre sa voix sur RCF ou sur France Inter dans un spot du CCFD. Retrouvez son histoire.
Je m’appelle Paixao de Jesus Santo. J’ai 41 ans. Je suis marié et père de trois enfants. Je suis né à Nostra Senhora das Graças, dans la commune de Conceiçao, dans le Sertao Bahianais (une région semi-aride, située au nord est du Brésil). J’ai grandi dans une famille de neuf enfants. Mes parents ne disposaient que de peu de terres. C’est pour ça que, lorsque j’ai fondé une famille, il a fallu que je trouve un endroit pour vivre. En 1999, j’ai donc occupé une terre avec 56 autres familles. C’était une fazenda (une exploitation agricole) abandonnée de 8500 hectares, dont plus de la moitié de caatinga (terres très arides, très peu fertiles). Aujourd’hui, entre 300 et 400 personnes vivent sur cette exploitation. Nous y faisons surtout de l’élevage de chèvres et de moutons. On cultive également un peu de haricots, du maïs, des courgettes, etc. Le problème, c’est que nous n’avons pas l’eau qui nous permettrait de cultiver plus et mieux. L’eau est la principale difficulté pour nous et nous demandons sans cesse aux autorités des moyens pour forer des puits artésiens. Car nous savons qu’il y a de l’eau de bonne qualité dans le sous-sol. Parallèlement, je fais parti du CETA (Mouvement des travailleurs asentados et acampados et Quilombolas (1)) de Bahia qui représente environ 15 000 familles, soit 60 à 70 000 personnes. Le combat du CETA est le même que celui du mouvement des paysans sans terre (MST) : pour nous, chaque famille doit disposer de sa terre. Parce que c’est seulement avec la terre que nous pouvons produire des aliments pour mettre sur la table. Pas seulement la notre, mais aussi celles de tous les Brésiliens. La seule chose que nous apporte la canne à sucre, c’est la misère. L’avancée de la canne à sucre est un sujet dont nous parlons de plus en plus souvent, que ce soit entre paysans ou entre responsables syndicaux. En vérité, aujourd’hui, il existe une lutte entre deux camps. D’un côté, nous autres les paysans qui voulons une terre pour nourrir notre famille et la population. Et de l’autre, des grandes entreprises et l’état qui investissent dans la canne à sucre. Pour nous, ces investissements enlèvent le pain de la table des travailleurs et de tous les brésiliens. Parce qu’au fond, c’est pour qui cet « alcool » (le terme employé au Brésil pour désigner les agrocarburants) ? Ce n’est pas pour nous. Nous, nous n’avons rien à gagner avec la culture de la canne à sucre. Ni terre, ni travail. En fait, la seule chose que nous apporte la canne, c’est la misère. La canne à sucre détruit notre vie, notre histoire. En plus, lorsque les terres sont consacrées à la canne, lorsque le gouvernement investit dans cette culture (travaux d’irrigation, notamment), il renonce à la réforme agraire. Investir dans la canne à sucre plutôt que de donner les moyens aux paysans de cultiver le haricot, le riz, les courgettes, etc… c’est laisser quelques grands propriétaires s’enrichir et empêcher les travailleurs de gagner dignement leur vie. » Témoignage recueilli par Jean-Claude Gerez avec l’aide de l’AS-PTA, partenaire brésilien du CCFD. 15 février 2008 (1) Acampamento : camp provisoire et très précaire, monté tout de suite après l’occupation d’une terre par des familles de paysans. Assentamento : Une fois le titre de propriété acquis, le camp initial disparaît au profit d’un véritable village, disposant d’infrastructures plus ou moins complètes. Quilombolas : communauté rurales composées de descendants d’esclaves Ce témoignage a été diffusé sur RCF du lundi 25 au vendredi 29 février et sur France Inter du lundi 3 mars au vendredi 7 mars 2008.Ecoutez le spot radio :Documents joints
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