Neutralité carbone : le pari de la conversion plutôt que de la compensation (edito)
La compensation carbone ou comment maintenir l’ordre des choses, continuer à vivre comme avant, au même rythme, avec les mêmes moyens de production, avec le même niveau d’émissions de gaz à effet de serre… ou plus.
Cette solution est parée des plus beaux atours pour séduire. Elle permet d’atteindre la neutralité carbone, présentée comme la condition première pour éviter un réchauffement mortifère de notre planète. Elle offre aussi l’attrait de solutions naturelles lorsqu’il s’agit de sanctuariser terres et forêts pour les transformer en puits de carbone. Elle flatte l’intelligence humaine en s’appuyant sur des technologies de pointe, quoique incertaines, pour emprisonner après l’avoir capté, le carbone dans les couches profondes de la terre. Elle offre des perspectives financières sur le marché des crédits carbone.
Mais surtout, elle (nous) garantit de ne rien devoir réduire. Voilà qui devrait nous interpeller. Ne rien changer quand pourtant tout nous appelle à une conversion profonde, intégrale, pour protéger notre planète, la maintenir habitable pour nous, pour les générations futures.
Ce que dissimule la compensation, nous est révélé dans ce numéro d’Échos du monde.
Une voie vers la neutralité carbone qui ne remet pas en cause un modèle fondé sur une croissance pensée comme infinie sur une planète dont les ressources sont pourtant finies ! Une option accompagnée et encouragée par les États qui offrent terres et forêts à l’appétit dérégulé de multinationales, transformant la lutte contre les dérèglements climatiques en objet de spéculation et source de profits. Un nouvel eldorado qui illustre tristement cette capacité du modèle économique dominant à faire sienne toute problématique pour en tirer le meilleur parti financier, quitte à prôner des solutions qui ne font qu’alimenter les situations qu’elles se vantent de pouvoir assainir.
Pourtant, cette « pensée magique » a un prix qui, lui, comme toujours, est bien réel, incarné, humain. Celui payé par les plus pauvres de notre planète, toujours plus nombreux à subir les effets d’une crise climatique qui se déploie, faute de réduction réelle des émissions de gaz à effet de serre des pays les plus développés. Il faut écouter et faire entendre la voix de celles et ceux privés de leur environnement nourricier, au péril de leur souveraineté alimentaire, pour permettre cette compensation. Leur souffrance et leurs inquiétudes nous interpellent et nous indignent. Leur détermination et leur combat sont autant d’appels à agir, à rester mobilisés.
Face aux dérèglements climatiques qui révèlent les interdépendances de l’humanité de façon flagrante et dramatique, les seules solutions viables et acceptables sont celles qui se fondent sur l’équité, la solidarité et le respect des droits humains. Nul, dans ses droits et son environnement, ne doit se résumer à une variable d’ajustement du confort et des désirs d’un autre.
Par respect pour la Terre et pour chacun de ses habitants présents et futurs, nous devons réduire nos ambitions pour réduire nos émissions. Les terres nourricières doivent être mises à l’abri des marchés. Et s’il faut séquestrer le carbone, il faut le faire en agissant toujours plus pour la transformation de nos systèmes agricoles et alimentaires au profit d’une agroécologie paysanne et solidaire. Un véritable programme de conversion. Une conversion écologique et solidaire prônée par le CCFD-Terre Solidaire.
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