Paraguay : les droits sociaux menacés ?

Publié le 20.12.2013| Mis à jour le 08.12.2021

Élu président du Paraguay le 21 avril 2013, Horacio Cartes, 56 ans, a assuré qu’il ferait de la lutte contre la pauvreté une priorité de son mandat, tout en critiquant la politique d’aides sociales mise en place par son prédécesseur. De quoi inquiéter plus de 2,5 millions de Paraguayens vivant en dessous du seuil de pauvreté.


Devant sa maison de planches et de tôles ondulées, située dans le quartier de Chacarita au cœur d’Asunción, Carmen, mère célibataire, étend des draps immaculés. Sur le seuil, sa fille de trois ans coiffe sa poupée. Son petit frère dort à côté d’elle, dans un landau.

« Mes deux autres gamins sont à l’école. Il y a encore trois ans, l’aîné de huit ans m’aidait en vendant des friandises dans la rue après la classe. Ça ne rapportait pas beaucoup d’argent mais ça permettait de compléter mes revenus de lavandière. Le problème, c’est qu’il était fatigué et manquait souvent l’école. »

En 2011, la situation a changé.

« J’ai commencé à bénéficier d’une allocation de l’État pour mes deux plus grands, à condition qu’ils soient scolarisés. »

Une manne financière doublement bienvenue.

« Cet argent est régulier et permet de vivre plus dignement. J’espère qu’avec le nouveau président, on ne va pas perdre ce que nous avons obtenu avec Fernando Lugo Mendez. »

Fernando Lugo Mendez : l’espoir du changement

Second pays le plus pauvre d’Amérique du Sud après la Bolivie, le Paraguay compte 40 % de pauvres (sur 6,5 millions d’habitants) dont 20 % vivent dans l’indigence. C’est en promettant de lutter contre ce fléau que Fernando Lugo Mendez, un ancien évêque, avait été élu président en 2008.

Le scrutin avait d’ailleurs constitué un tournant dans l’histoire de ce petit pays coincé entre l’Argentine et le Brésil, marqué par plus de soixante ans de parti unique, le Parti Colorado, dont trente-cinq de dictature.

Incarnant l’espoir de changement, notamment à travers sa promesse d’une réforme agraire, dans un pays où 2,5 % des propriétaires concentrent 85 % des terres, Lugo Mendez n’a cependant pas pu mener à bien la tâche qu’il s’était fixée.

En cause, notamment, une absence de majorité politique et des multinationales agroindustrielles très puissantes dans un pays gros producteur de cultures transgéniques. Ces forces politiques et économiques ont aussi largement contribué à sa destitution, par le Parlement, le 22 juin 2012. Et à l’élection le 21 avril 2013, de son successeur, Horacio Cartes, candidat du Parti Colorado.

Horacio Cartes : la fin des politiques sociales ?

Riche homme d’affaires, le nouveau président a assuré, dès les résultats connus [[45,8 % des voix, devant Efrain Alegre du Parti libéral authentique (PLA) avec 36,9 %. Résultats officiels du Tribunal supérieur de la justice électorale (TSJE).]], qu’il allait « tout mettre en œuvre pour inverser la courbe de la pauvreté ».

Reste à savoir comment. Car, lors de la campagne, celui que l’on surnomme le « Berlusconi paraguayen » a été très critique sur les programmes de transferts monétaires avec responsabilité (TMC) mis en place par son prédécesseur. En particulier, le programme Tekopora (« Bien-être » en langue guarani), regroupant diverses aides sociales inspirées de la Bourse famille brésilienne. Considérées comme des « mesures assistantialistes » par Horacio Cartes, ces allocations bénéficient aujourd’hui à près de 490 000 personnes, selon le Programme des Nations unies pour le développement.

« À cette politique de redistribution, il faut ajouter d’autres mesures sociales importantes, précise l’économiste José Carlos Rodriguez, dans le domaine de la santé, de l’éducation et du logement. »

« Sous le mandat de Fernando Lugo Mendez, de nombreux hôpitaux et postes de santé ont été construits, notamment en milieu rural, rappelle quant à lui Antonio Adrian Zena, membre de la Coordination nationale de la Jeunesse ouvrière chrétienne (Joc), partenaire du CCFD-Terre Solidaire.

« Il a surtout développé une couverture maladie accessible aux plus démunis et a facilité leur accès à la propriété. »

Même chose concernant l’éducation, avec la construction de nombreux établissements et la démocratisation de l’accès aux études supérieures. Autant d’avancées qui ont amélioré la vie des gens simples.

« Il sera très difficile au pouvoir en place de supprimer ces aides et de revenir sur ces mesures sociales, estime Antonio Adrian Zena, désormais considérées comme des droits. » Des droits que Carmen n’envisage pas de perdre.

« C’est le seul moyen pour que mes enfants puissent aller à l’école et se construire une vie meilleure que la mienne. »

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