Une manœuvre du gouvernement fait voler en éclats l’ambition de transparence fiscale

Publié le 16.12.2015| Mis à jour le 08.12.2021

Mercredi 16 décembre 2015, le gouvernement a montré un bien triste visage cette nuit à l’Assemblée nationale alors que se tenaient les discussions autour du reporting public pays par pays, une mesure essentielle dans la lutte contre l’évasion fiscale. Après un premier vote de l’Assemblée favorable à la transparence fiscale, le Gouvernement a manœuvré en coulisses, mobilisé des députés au milieu de la nuit pour un nouveau vote qui a finalement rejeté le reporting public pays par pays. Ce coup de force de l’exécutif ralentit dangereusement la lutte contre l’évasion fiscale.


Communiqué de presse de la Plateforme paradis fiscaux et judiciaires* en partenariat avec One France

Cette nuit, l’Assemblée nationale a envoyé un signal extrêmement négatif dans la lutte contre l’évasion fiscale. Dans le cadre de la deuxième lecture du PLFR 2015, vers 1h30 du matin, les députés ont finalement rejeté le reporting public pays par pays après l’avoir pourtant adopté deux fois. La première fois il y a 10 jours, dans le cadre de la 1ère lecture du PLFR (voir communiqué de la Plateforme du 4 décembre). La seconde, cette nuit à minuit, quand les députés ont voté en scrutin public en faveur de l’amendement concerné à 28 voix contre 24. Mais le gouvernement, défavorable à cette mesure, a demandé une seconde délibération. Au terme d’une suspension de séance qui a duré plus de 40 minutes, et au cours de laquelle le gouvernement a orchestré les conditions d’un nouveau vote en sommant des députés de corriger le tir et en appelant d’autres à la rescousse, il a refait voter l’Assemblée et a finalement obtenu le rejet de cet amendement, à 25 voix contre 21 [1].

Les organisations de la Plateforme Paradis Fiscaux et Judiciaires, notamment le CCFD-Terre Solidaire, Oxfam France, Peuples Solidaires ActionAid France mais aussi ONE France dénoncent avec la plus grande fermeté ce passage en force. Nos organisations appellent les députés mobilisés contre l’évasion fiscale à poursuivre leur bataille, notamment dans le cadre de la loi Transparence qui sera présentée par Monsieur Sapin en début d’année [2].

Nos organisations rappellent que cette mesure, défendue depuis une dizaine d’années par les organisations de la société civile, aurait obligé les entreprises françaises à rendre publiques des informations sur leurs activités et les impôts qu’elles paient dans tous les territoires où elles sont implantées. Elle aurait ainsi permis à la société civile dans son ensemble de savoir si les impôts payés par les entreprises correspondent à leur activité économique réelle. Sans cette mesure de transparence essentielle pour mettre fin à l’évasion fiscale, les entreprises continueront à construire des montages fiscaux artificiels dans le but d’échapper à l’impôt et donc de priver les pays des recettes fiscales nécessaires au financement de leurs services publics. C’est donc la pauvreté et les inégalités qui vont continuer à croître, notamment dans les pays en développement qui souffrent particulièrement des pratiques d’évasion fiscale des entreprises multinationales.

Contacts presse:

CCFD-Terre Solidaire : Eleonora Trementozzi, 01 44 82 80 68 – Karine Appy, 06 66 12 33 02

Oxfam France : Caroline Prak, 06 27 15 80 99

ONE France : Annabel Hervieu, 06 31 22 89 68

Peuples Solidaires ActionAid France : Lison Rehbinder, 06 31 29 11 60

Notes aux rédactions

Le vote portait sur les amendements 48, 11, 55 et déposés respectivement par des députés socialistes et écologistes engagés dans la lutte contre l’évasion fiscale comme Pascal Cherki, Eric Alauzet, Dominique Potier, Yann Galut. Il prévoyait que les entreprises multinationales rendent public publique chaque année leur chiffre d’affaires, leurs bénéfices, le nombre de leurs filiales et de leurs employés, et le montant des impôts payés dans chacun des pays dans lesquels elles sont implantées.

[1] Le détail sur le premier vote est disponible ici. Le deuxième vote après suspension de séance à la demande du gouvernement portait sur un amendement gouvernemental visant à supprimer l’amendement tout juste voté et le détail des votes se trouve ici.

[2] En avril 2013, le Président François Hollande a fait un discours fort en faveur d’une transparence accrue pour les banques mais aussi pour toutes les grandes entreprises multinationales « Les banques françaises devront rendre publique, chaque année, la liste de toutes leurs filiales, partout dans le monde, et pays par pays. Elles devront indiquer la nature de leurs activités. (…) L’ensemble de ces informations seront publiques et à la disposition de tous. Je veux que cette obligation soit également appliquée au niveau de l’Union européenne et, demain, étendue aux grandes entreprises. »

* Membres de la Plateforme Paradis fiscaux et judiciaires :Retour ligne automatique
Les Amis de la Terre – Anticor – Attac France – CADTM France – CCFD-Terre Solidaire – CFDT – CGT – CRID – Droit pour la justice –Observatoire citoyen pour la transparence Financière Internationale – Oxfam France – Justice et Paix – Réseau Foi et Justice Afrique Europe – Secours catholique Caritas France – Sherpa – Survie – Syndicat de la magistrature – Solidaires Finances Publiques – Transparency International France (www.stopparadisfiscaux.fr)

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