L’importance de la communauté

Publié le 21.01.2016

Le terme de communauté est cher aux chrétiens. Il désigne une aspiration à manifester la bonne nouvelle reçue du Christ à travers une qualité de relations humaines propre à faire advenir un monde plus fraternel, plus solidaire, plus heureux. Creuset du partage, de la célébration et de l’approfondissement de la Parole et du Pain, la communauté chrétienne cherche par son mode de vie au cœur des sociétés à témoigner de sa foi.


Depuis toujours cependant, ce terme a revêtu des réalités bien différentes. Pour ce qui est d’aujourd’hui, pensons aux communautés monastiques, paroissiales, charismatiques, web communautés… Ce foisonnement laisse apparaître une diversité des conceptions mêmes de la notion de communauté, comme des degrés d’implication des membres qui les constituent. Tisser du lien avec les autres relève d’une capacité humaine de base. La possibilité de le faire sous l’angle d’une communauté à fonder, ou à entretenir, ou à désirer comme un bien, vient de là. C’est une modalité sociale parmi d’autres. Les chrétiens n’en ont donc pas le monopole ! Leur appartient en revanche le fait qu’ils en poursuivent l’idéal au nom du Christ, reconnu par là même comme celui qui fonde et rassemble, dans un certain esprit (l’Esprit), la communauté qu’ils forment, celle des disciples, dans et par les multiples communautés aux visages si variés.


De la société à la communauté en passant par le groupe : le trajet d’une liberté humaine

Toute personne émerge de et par la relation sociale, c’est un fait. Chaque être humain naît dans d’ici et maintenant d’une société – à commencer par celle qui lui tient lieu de famille – qu’il ne choisit pas, mais dans laquelle il baigne et qui lui donne forme d’existence au milieu des autres. Or, la capacité à développer une distance critique par rapport à ce donné de départ, pour investir, en son nom propre cette fois, ses propres réseaux sociaux, fait partie de la maturation humaine. Ceux-ci constituent alors autant de communautés d’appartenance, choisies à partir de cette première société non choisie et déjà multiforme.

Les communautés que nous choisissons de rejoindre, de former, et que nous modifions du fait même d’en devenir membre, sont diverses : cela va de la manière de s’approprier le lien familial, à l’installation dans un contexte nouveau, un pays lointain, en passant par les multiples associations explicites (parents d’élève, pêcheurs à la ligne, paroisse, etc.) ou implicites (habitants d’un même quartier, village, même sensibilité politique, habitudes de consommation, etc.). Elles sont choisies dans la mesure où nous assumons en notre nom propre d’en faire partie.

Notons que la société dans laquelle l’être humain a baigné dès avant même sa naissance, durant son enfance et au-delà, est souvent élue comme première communauté d’appartenance, au nom d’une préférence de cœur. Mais ce n’est pas automatique. Cette première expérience a pu en effet être malheureuse rendant une autre société ou un autre milieu social, d’adoption, préférable. Participe au génie humain la capacité sociale qui consiste à créer du lien, à partir de relations données, déjà là, non choisies, et au-delà d’elles, en allant à la rencontre d’autres. En d’autres termes, nous sommes capables de faire du nous (des comme moi) avec du ils/elles (des autres que moi).

La personne manifeste donc son état adulte quand elle articule l’inscription de fait dans une société donnée (qui peut être un mixte de plusieurs sociétés) et l’implication dans des groupes d’appartenance choisis au nom de préférences personnelles (violons d’Ingres, options politiques, cause humanitaire, sensibilité spirituelle, appétence intellectuelle, associations de citoyens, etc.).

Mais le terme communauté, qui vient ici assez spontanément désigner ces réseaux reliant des personnes entre elles, est-il adapté ? Car il existe plusieurs degrés dans l’exercice de la capacité sociale, relationnelle, humaine : de la société subie, qui devient pour une part choisie à travers l’appartenance voulue à divers groupes, à la communauté proprement dite désirée comme telle, une trajectoire doit être effectuée. Sans compter que ce terrain, miné par le risque de communautarisme, exige une vigilance.

Ainsi, la société serait ce qui s’impose à nous comme terreau relationnel. Ses profils culturels sont reconnaissables par des rapports de différence avec d’autres groupes (par exemple : un village de guerriers massaï et un quartier cossu de Paris ; un repas traditionnel au Japon et un repas de fête en France), et foisonnants en son sein (aucune société humaine n’est homogène). Elle nous précède, nous intègre, nous dépasse. Un groupe, ce serait un ensemble de personnes rattachées entre elles par un centre d’intérêt commun, mais dont les membres s’appuieraient les uns sur les autres, voire se serviraient les uns des autres, pour atteindre ce que chacun vient y chercher. Une communauté désignerait alors un groupe formé, non pas d’abord autour d’un intérêt commun, mais par la force d’une aspiration transversale à construire des liens sensés au nom d’un idéal qui concerne la vie sociale dans son ensemble et que chacun des membres s’efforce d’incarner à son propre niveau. Elle inclut l’exigence d’une solidarité entre les membres qui passe par une mise en commun des biens, des savoirs, des compétences, en des proportions variables.

L’idéal déployé peut être d’ordre spirituel. C’est le cas des communautés chrétiennes. Qui dit idéal dit éthique, d’où les rappels et mises au point de l’apôtre Paul pour que le profil de société qui se dégage de ces communautés soit en accord avec ce que celles-ci célèbrent et proclament. Et qui dit éthique dit aspiration à élargir l’espace de la tente pour que d’autres bénéficient de cette vie ensemble éprouvée comme bonne.

La communauté chrétienne :une fraternité heureuse, à la joie contagieuse

Les communautés chrétiennes désirent que le mode de vie qu’elles portent, cultivent et inventent à chaque génération, prenne forme en toutes les sociétés, de sorte de faire advenir une communauté humaine polyphonique et harmonieuse.

Mais il est question en même temps de vigilance. Car toute communauté court le risque de se fermer sur elle-même, croyant à tort être déjà parvenue à incarner l’idéal, s’arrogeant le droit et le devoir de violenter ceux restés à l’extérieur et dont la différence insécurise. Le communautarisme, c’est la perversion de l’idéal communautaire. L’antidote ? Se laisser interroger par ce qui nous est étranger. Car l’ange du Seigneur vient souvent par là…

Marie-Christine Bernard,
théologienne, spécialiste en anthropologie (www.mariechristinebernard.org)

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