Liban : s’engager auprès des réfugiés syriens (témoignage)
Au Liban, le CCFD-Terre Solidaire, soutient le Jesuit Refugee Service qui vient en aide aux réfugiés syriens au Liban. Le père Cédric Prakash, chargé du plaidoyer au sein du Jesuit Refugees Service (JRS), fait le point sur leur situation.
La majorité des réfugiés ne se sentent pas les bienvenus au Liban et pas accueillis par la population. Leurs enfants n’ont pas accès au système scolaire public général. Ils vont à l’école l’après-midi, quand les enfants libanais ont fini leur journée.
Les adultes ont des difficultés à trouver du travail. Ils savent que le passé pèse lourd dans les relations entre les deux peuples et que les Libanais n’ont pas oublié l’occupation syrienne et ses exactions. Mais ils n’y ont pas participé et n’en sont donc pas responsables.
De même, ils ont le sentiment que leurs droits ne sont pas respectés. Ce sentiment recouvre beaucoup de choses. Comme être accusé, sans preuve, de délit, de crime, de vol, être emprisonné arbitrairement, être considéré a priori comme un criminel parce que vous êtes réfugié syrien.
Mais aussi ne pas se sentir en sécurité dans un taxi, craindre d’être insulté ou molesté. Ou encore voir ses enfants victimes de jets de pierre.
D’après une étude que nous avons mené auprès des réfugiés, l’immense majorité, soit 77 %, ne veut pas rester au Liban. Parmi ceux-là, 61 % veulent rentrer chez eux et 16 % souhaitent quitter le Liban pour un autre pays, le Canada, l’Australie, l’Europe. 13 %, ne savent pas où aller et se sentent coincés au Liban, pour une raison ou une autre.
Ceux qui désirent rentrer en Syrie expriment de fortes inquiétudes
Récupèreront-ils leurs propriétés, leur maison, leur terre ? Ou ont-elles été confisquées par le gouvernement ?
Depuis l’adoption de la loi n° 10, leurs craintes se sont accrues. Les jeunes hommes et leurs familles redoutent un enrôlement de force dans l’armée. Ils ont peur aussi de représailles, d’actes de vengeance, de châtiments. Se pose aussi la question des services éducatifs pour les enfants dans des zones dévastées, celle des emplois, des services de base. Ils ne pensent pas le retour possible pour l’instant, car ils n’ont pas de réponse à ces questions.
Nous sommes très attachés aux critères institués par le UNHCR (l’Agence des Nations unies pour les réfugiés) : le retour doit être volontaire et se faire dans la dignité, ainsi qu’au principe de « non-refoulement » adopté par la Convention de Genève de 1951 et par la majorité des États dans le monde : aucun gouvernement ne doit obliger un réfugié à quitter son pays d’accueil pour un État où sa vie et son intégrité seraient menacées.
Concernant la Syrie et les réfugiés syriens au Liban, nous jugeons que les conditions ne sont pas réunies actuellement pour un retour. Nous allons essayer de faire en sorte que les municipalités s’engagent pour un séjour digne des réfugiés et que des ponts soient construits entre réfugiés et citoyens libanais. Créer un environnement de confiance réciproque, ou du moins d’acceptation réciproque facilitera le retour le moment venu.
Éléonore Fallot, chargée de mission.
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