A Beyrouth, soutien aux petites entreprises pour se reconstruire après l’explosion

Publié le 05.11.2021| Mis à jour le 20.12.2021

Après l’explosion sur le port de Beyrouth, l’organisation libanaise MADA, soutenue par le CCFD-Terre Solidaire, s’est fortement mobilisée pour apporter une aide d’urgence.
Elle a également développé un programme d’appui aux petites entreprises qui a déjà permis à 33 d’entre elles de se reconstruire.

Reportage à Beyrouth

Un an après, son garage peut fonctionner normalement

Tony Lawandos est adossé à un mur, à côté d’une Mini Cooper rouge fraichement repeinte. Le regard malicieux, il discute avec un ami.

Il se tient à l’entrée de son garage automobile, entièrement réhabilité depuis que ce dernier fut sévèrement endommagé par la double explosion du 4 août 2020.

A notre arrivée, il nous emmène au fond de la pièce pour montrer le dernier équipement qu’il a reçu : un compresseur d’air pour refaire les carrosseries.

Fanny Kaikati, coordinatrice du projet, et Elie Assi, ingénieur et architecte, écoutent Tony.

Le garagiste a eu de la chance : son atelier se situe à quelques centaines de mètres du port, dans le quartier de Mar Mickaël.

Au moment de l’explosion, il était dans le sous-sol de son voisin. Retour ligne automatique
Ils ont été protégés.

Plus d’un an après, le garage peut fonctionner normalement mais la crise ralentit sérieusement l’activité : « Il n’y a que les riches qui ont désormais les moyens de s’occuper de leur voiture », regrette Tony.

Entre les quartiers de Mar Mickaël et de Bourj Hammoud, Fanny et Elie s’arrêtent visiter le couple Kokejian.

« On garde le sourire et l’énergie »

Pour ce magasin, MADA est intervenue après la réhabilitation en fournissant des vélos.

Pourtant là-aussi, la crise n’aide pas les commerçants à se relever : « Nous avons désormais un magasin et des produits à vendre, mais il n’y a plus de clients ! » regrette Véra Kokejian. Sur le pas de la porte, elle précise : « On garde le sourire et l’énergie mais ce n’est pas facile, nous avons aussi perdu notre maison dans l’explosion ».

Le 4 août 2020, c’est tout le quotidien des Kokejian qui a été soufflé.

Deux catastrophes simultanées

Dans les bureaux de l’association, située à Ain El Remmaneh, Fanny Kaikati et Elie Assi expliquent comment le projet a débuté à la mi-novembre 2020 pour identifier les besoins réels des commerçants.

L’ONG a développé une grille de notation très précise après avoir fait des visites sur le terrain. Une liste initiale de 129 entreprises a été établie et a permis de lever des critères de vulnérabilité. Ensuite, un comité de sélection s’est réuni afin de choisir les 33 entreprises bénéficiaires.

« Nous avons travaillé en coopération avec d’autres ONG, souligne Fanny Kaikati. Parfois, l’une s’occupait de la réhabilitation, et nous arrivions pour l’équipement. »

Le projet soutenu par le CCFD-Terre Solidaire, et financé par le Centre de crise et de soutien du Ministère de l’Europe et des Affaires Etrangères, est pensé en trois temps :

  • aide à la réhabilitation,
  • aide pour l’équipement
  • aide au renouvèlement du stock.

Le projet a été retardé en raison de la crise économique que traverse le Liban. « Le pays a vécu deux crises graves en simultané : la double explosion du port et la crise économique », explique Fanny Kaikati.

« Certaines entreprises n’ont pas réouvert, d’autres patrons se sont adaptés en ouvrant à capacité réduite, en télétravail, ou en occupant un autre emploi le temps que la situation s’améliore ».

Les confinements, les coupures d’électricité et les pénuries de matières premières ont aussi ralenti les chantiers. L’électricité pose surtout un problème pour les magasins alimentaires. « Nous réfléchissons à fournir des batteries ou des panneaux solaires », expliquent-ils.

Prochain défi : adapter les activités à la crise

Le projet avec le CCFD-Terre Solidaire propose aussi un volet « soft-skills ». D’ici l’automne 2021, entre 5 et 10 entreprises seront choisies pour suivre le programme qui vise à adapter leurs capacités en temps de crise économique grâce à une aide comptable ou marketing.

Ce sera par exemple le cas de l’entreprise Garlidoux, qui a breveté une crème d’ail plus facile à digérer. « Nous avons aidé à la réparation de l’usine située en face du port, dans le quartier de la Quarantaine [un des quartiers les plus gravement touchés], ainsi qu’à renouveler le stock d’ail et d’huile, explique Elie. L’entreprise a réouvert mais le contexte économique est peu favorable à ce produit de niche. C’est typiquement le genre d’usine qui pourrait bénéficier du programme Soft skills ».

Sidonie Hadoux

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