Afrique du Sud : Quel impact pour l’Alternative Mining Indaba ?

Publié le 30.03.2015

Charlotte Kreder, chargée de mission au CCFD-Terre Solidaire, s’est rendue du 9 au 12 février au Cap, en Afrique du Sud, pour la réunion annuelle de l’Alternative Mining Indaba. Un contre-forum de quatre jours sur les problématiques liées au secteur minier organisé par la société civile sud-africaine, au moment où se tient dans la même ville la grande conférence minière Mining Indaba, qui réunit les plus grands groupes du secteur privé et des décideurs politiques. Entretien.

En quoi consiste l’Alternative Mining Indaba ?

Il s’agit d’un évènement coordonné par le réseau Justice Economique de FOCCISA (Fellowship of Christian Councils in Southern Africa) qui vise à comprendre et échanger sur les impacts sociaux résultant de l’exploitation des ressources naturelles et à exiger une gestion transparente et une meilleure répartition des revenus des activités minières.
Durant cette réunion de quatre jours, des acteurs de la société civile de 37 pays ont essentiellement échangé leurs expériences, proposé des formations sur différents thèmes tels que les législations minières ; les possibilités d’action en justice contre les compagnies minières ; l’évasion fiscale ; l’évaluation d’impacts au sein des communautés etc…
Il s’agissait également de pouvoir développer des stratégies de plaidoyer afin de rendre les gouvernements et compagnies minières responsables de leurs actes et plus engagés dans le développement des communautés.

Ce forum Alternative Mining Indaba (AMI) a-t-il répondu à vos attentes ?

Charlotte Kreder : Nous nous sommes retrouvés quelques 300 représentants d’ONG rassemblés dans un grand hôtel du Cap – le Hilton Double Tree du quartier de Woodstock – dans une ambiance assez éloignée des réalités vécues par les communautés minières. Ces dernières, tout comme les mouvements sociaux, étaient d’ailleurs peu représentées. Certaines voix critiques se sont élevées pour dire qu’il faudrait faire un forum alternatif au forum alternatif ! Parmi ces voix figuraient le People’s Dialogue, un réseau d’échange entre des organisations d’Afrique Australe et d’Amérique latine, dont font partie plusieurs partenaires du CCFD-Terre Solidaire. Certaines organisations ont donc eu des discussions en marge de l’Alternative Mining Indaba afin d’aborder plus directement les questions politiques de fond et de proposer de réelles alternatives.
En effet, même s’il est regrettable que les formations n’aient pu atteindre les communautés de base qui en auraient eu le plus besoin, la grande question demeure celle des orientations économiques choisies par de nombreux pays notamment en Afrique australe : convient-il uniquement de trouver le moyen de faire en sorte que les populations puissent bénéficier au mieux des ressources en s’accommodant au mieux d’un modèle basé sur l’exploitation sans limites de ressources avec les conséquences désastreuses sur les hommes et l’environnement ou réfléchit-on à un changement systémique durable et viable ?

Quel rapport entretient l’AMI, le forum alternatif, avec la réunion formelle, le Mining Indaba annuel, couru par toutes les grandes entreprises ?

C’est un rapport finalement très distant, et la question reste posée : comment atteindre les magnats des activités minières ? Il faut savoir que le Mining Indaba se déroule dans la cité balnéaire du Cap, loin des centres miniers du pays, situés dans les régions de Johannesburg et Kimberley notamment, afin d’éviter toute confrontation avec les mineurs. Les risques de grèves et de manifestations de mineurs y sont bien plus réduits qu’à Johannesburg, la capitale économique. Cette distance fait aussi qu’il est beaucoup plus compliqué pour les mineurs et les mouvements sociaux de s’organiser en amont pour préparer leurs recommandations et savoir comment les transmettre. En outre, les coûts de participation au Mining Indaba, qui s’élèvent à plus de 500 euros, sont aussi très dissuasifs pour ceux qui voudraient se faire entendre dans l’enceinte de la conférence.

Qu’avez-vous retenu de votre passage au Cap ?

J’ai beaucoup appris au cours des échanges que j’ai eus en marge de l’Alternative Mining Indaba avec les membres du réseau People’s Dialogue, qui ont organisé un événement public en marge du forum pour ouvrir les débats à la population.
S’ils ne l’avaient pas fait, les débats seraient restés cantonnés entre experts des ONG. Nous avons surtout parlé de mobilisation sociale, car une importante réflexion est en cours en Afrique du Sud autour des mouvements sociaux et des nouvelles formes de mobilisation. Les interlocuteurs latino-américains présents au Cap donnaient des exemples concrets de mobilisation, avec des barrages sur les routes, des façons de repousser des projets et des entreprises – des initiatives concrètes pour bloquer des projets miniers qui ont un impact nocif pour les populations.

Nous avons également discuté de cette question : Que propose-t-on en tant qu’acteur associatif à la jeunesse et à une population majoritairement au chômage ? On parlait de « classe ouvrière » dans les années 1970, mais aujourd’hui, une part importante des actifs ne travaille pas dans certains pays – comme l’Afrique du Sud ou le Brésil. Comment les rendre acteurs d’une réflexion sur la construction d’un projet de société, au lieu de céder la place à la montée du fondamentalisme religieux ou de l’extrême-droite ? Cette réflexion se passe à un niveau global. Elle ne concerne pas l’Afrique du Sud ou l’Afrique seulement, mais elle est aussi partagée par le CCFD-Terre Solidaire ainsi que par de nombreux autres partenaires de par le monde.

Propos recueillis par Sabine Cessou

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