Apporter des solutions au défi alimentaire mondial
La diffusion de la faim et de la pauvreté rurale, conjuguée à la volatilité des prix, mettent le doigt sur l’urgence de décupler les actions en 2009 afin d’éviter que ne se reproduisent les crises alimentaires
Le groupe d’action de haut niveau de l’ONU sur la crise alimentaire (GAHN)
En avril 2008, Ban Ki-moon, secrétaire général de l’ONU, a créé un « groupe d’action de haut niveau de l’ONU sur la crise alimentaire » (GAHN) afin de « présenter une réponse unifiée pour parvenir à instaurer la sécurité alimentaire dans le monde. » Le groupe d’action offre aux agences de l’ONU et de Bretton Woods l’opportunité de collaborer afin de mettre au point une réponse collective à la crise alimentaire. Il manque cependant de ressources et de moyens et doit encore définir concrètement le rôle qui sera le sien dans les efforts continuellement menés afin de résoudre la crise.
Le « cadre global d’action » (CFA), fruit des efforts du groupe d’action en juillet 2008, reflète sa « double personnalité » : il parvient à capturer les multiples facettes de la crise et à formuler des recommandations positives. Parallèlement, il encourage des politiques macroéconomiques qui contredisent ses propres recommandations. Par exemple, le CFA souligne combien il est important d’investir dans les petits paysans, ce qui est une recommandation appropriée. Mais il incite par ailleurs à conclure le « cycle de Doha » et à poursuivre l’initiative Aide au commerce (Aid for Trade), même s’il a été prouvé qu’une libéralisation commerciale plus poussée nuirait aux petits agriculteurs et à l’environnement, au lieu de les protéger. L’intérêt des donateurs à orienter Aid for Trade vers une aide commerciale traditionnelle plutôt que vers une aide visant à augmenter les moyens de production dans les pays en voie de développement laisse sous-entendre qu’il y a peu de chances qu’elle marque une différence positive pour l’agriculture familiale.
Le Partenariat mondial pour l’agriculture et la sécurité alimentaire (GPAFS)
Le concept d’un « Partenariat mondial pour l’agriculture et la sécurité alimentaire » (GPAFS) a vu le jour lors du sommet pour l’alimentation de la FAO organisé en juin 2008 à l’initiative du gouvernement français et a été principalement étoffé au sein du G8 au cours des mois qui ont suivi. Le gouvernement espagnol a fait progresser l’initiative dans un document intitulé le Processus de Madrid : « Vers un Partenariat mondial inclusif pour l’agriculture et la sécurité alimentaire (GPAFS) », publié juste avant la réunion qui s’est tenue à Madrid en janvier et qui pose les bases d’une participation de parties prenantes multiples afin de renforcer l’efficacité de la lutte contre la faim aux niveaux locaux et mondiaux.
Le Partenariat mondial met en avant un certain nombre de propositions intéressantes :
• Il vise à redonner un second souffle à l’élan politique pour que soit prise au sérieux la question de la sécurité alimentaire.
• Il préconise l’intervention du secteur privé et de la société civile dans l’effort mondial contre la faim.
• Il reconnaît l’échec des structures en place de gouvernance mondiale alimentaire et agricole et incite à des dialogues politiques inclusifs qui traceraient des réformes politiques fondamentales.
L’initiative lancée par le Partenariat mondial présente un certain potentiel, mais sa direction reste à définir. La proposition initiale formulée par la France prévoyait une initiative à caractère politique de grande envergure qui, au-delà de mobiliser de nouveaux fonds, offrirait aux gouvernements l’occasion d’élaborer une stratégie mondiale en matière de sécurité alimentaire qui s’inspirerait des conseils prodigués par un groupe d’experts internationaux faisant autorité. Des discussions engendrées autour de cette proposition est ressortie l’idée que les donateurs devaient faire preuve de plus de coordination et les débats politiques ont été laissés de côté. A ce jour, aucun calendrier et aucune indication attestant d’un éventuel soutien financier au processus n’ont été identifiés. L’absence de direction et d’actions de suivi nuit au potentiel de l’initiative, donnant lieu à des malentendus et à une méfiance entre pays développés et pays en voie de développement
Interventions nationales
Pendant que la communauté internationale réfléchit à ce qu’elle doit mettre en œuvre pour contrecarrer l’envolée des prix alimentaires, petits et grands pays passent à l’action. Parmi les mesures les plus répandues figurent la baisse des tarifs et des taxes à l’importation, ainsi que l’apport de crédit et de participations aux agriculteurs nationaux. Environ quarante pays ont mis en œuvre des programmes d’aide alimentaire et différents filets de sécurité au cours de l’année dernière.
La Chine et l’Inde ont libéré des quantités significatives de stocks publics et donné l’autorisation aux entreprises étatiques de commerce céréalier d’intervenir. Quelques gouvernements ont opté pour les restrictions à l’exportation, soucieuses de garantir suffisamment de disponibilités alimentaires sur leurs marchés. Ces mesures ont ouvert des débats politiques passionnés en 2008 .
Tout compte fait, 63 pays ont adopté des mesures qui reposaient sur un soutien de la production, des programmes d’engrais ou de semences ou encore des interventions sur le marché en 2008 pour venir en aide à leur production agricole nationale. Le bilan de ces interventions politiques n’est pas homogène et bon nombre des résultats étaient liés au budget mis à disposition. Beaucoup d’entre eux ont dû trancher entre une aide d’urgence aux consommateurs ou un soutien aux producteurs.
Ces interventions ont donné naissance à une tendance mondiale intéressante. La FAO fait remarquer que « les réponses apportées par les pays en voie de développement à la crise de la sécurité alimentaire semblent contredire la voie politique que la plupart d’entre eux ont choisi de suivre au cours des dernières décennies ». En quelques mois seulement, la crise alimentaire a tellement ébranlé les fondations du consensus de Washington que même les critiques les plus virulents n’avaient pas pu prédire cette situation. La perte de crédibilité des marchés mondiaux en tant que garants de la sécurité alimentaire est un phénomène sérieux qui n’est pas prêt d’être endigué à court terme.
Le succès du Malawi…et les défis qui en découlent
Le Malawi a connu une crise alimentaire en 2005, lorsque la population locale a été sévèrement touchée par la sécheresse, qui a placé près de cinq millions de personnes dans une situation de dépendance alimentaire. Dès 2006, le gouvernement a décidé de se lancer dans un programme ambitieux de subvention des engrais et des semences, qui misait sur la distribution de 175 000 tonnes d’engrais et 4 500 tonnes de semences de maïs à rendement élevé. Le gouvernement du Malawi a pris en charge 87 % du coût du programme. Le programme a connu un succès : le Malawi a non seulement été en mesure de répondre à ses besoins en consommation de maïs, mais il a également réussi à dégager un excédent d’1,5 million de tonnes en 2007.
L’initiative, de taille, a permis au Malawi de se protéger de la crise alimentaire de 2007-2008. Désormais, le gouvernement doit faire face à des questions d’un nouvel ordre : le coût élevé du programme est-il justifié eu égard aux autres besoins du secteur agricole ? Comment toucher les paysans qui ont le plus besoin d’aide ? Quelles pourraient être les conséquences des engrais chimiques sur la productivité des sols à long terme ? La prochaine étape peut-elle consister à réformer le programme foncier de manière ambitieuse ?
Sources : FAO, Country responses to the food security crisis, décembre 2008, et IRIN, Subsidizing agriculture is not enough, février 2008
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