Enterrement de Quintino Cerceda Huisa, octobre 2016

Enterrement de Quintino Cerceda Huisa, octobre 2016

Au Pérou, la répression policière fait une nouvelle victime dans une zone minière

Publié le 21.10.2016| Mis à jour le 02.01.2022

Le 14 octobre 2016, un quatrième paysan a perdu la vie dans le cadre du conflit social qui oppose la population locale au plus grand investissement minier en cours au Pérou. CooperAcción, association partenaire du CCFD-Terre Solidaire très impliquée sur place, sonne l’alarme


Comme le rappelle le site péruvien El Gran Angular dans un reportage dédié au sujet, Las Bambas est le plus grand investissement minier dans l’histoire du Pérou, soit un pari de 10 milliards de dollars, propriété de l’entreprise publique chinoise MMG. L’extraction du cuivre devrait y consolider la place du Pérou comme deuxième producteur mondiale de ce minerai.
Cependant, le manque d’écoute des populations locales et la répression des protestations contre l’impact de ce mégaprojet situé à Apurimac a déjà entrainé la mort de quatre personnes depuis septembre 2015.

Ces victimes mettent en évidence les ombres des investissements miniers dans la région, en particulier les conventions qui permettent à une entreprise minière d’embaucher des services de sécurité de la police.

Cette fois-ci la victime est Quintino Cerceda Huisa, 42 ans, de la communauté Choquecca, dans le district de Chalhuahuacho. Le Ministre de l’Intérieur a confirmé son décès suite à une blessure par balle dans une confrontation avec la police, survenue le vendredi 14 octobre 2016.

Enterrement de Quintino Cerceda Huisa, octobre 2016
Enterrement de Quintino Cerceda Huisa, octobre 2016

Pour José de Echave, fondateur de CooperAccion, « Il est inacceptable – et cela est porteur d’un terrible message – que la Police Nationale missionnée dans la zone continue à opérer, à partir d’un QG établit dans le campement de l’entreprise minière, comme si c’était une police privée. Apparemment, le régime des accords entre entreprises minières et la Police Nationale, déjà observé à Yanacocha, Antamina et Espinar, se reproduit à Las Bambas.
Il ne reste pas d’autres solutions que d’annuler ces accords pour que la Police Nationale reprenne sa mission de protection de la sécurité de tous et non pas seulement de ceux qui peuvent se payer des services de protection spéciale. C’est uniquement ainsi que les forces policières pourront commencer à regagner la confiance de la population. »

La situation à Las Bambas est extrêmement critique. Après le soulèvement social de septembre 2015, un espace de dialogue n’a été installé que cinq mois plus tard, en février 2016. José de Echave explique que plus d’une année s’est écoulée sans que la population ne perçoive d’avancées sur le programme de mesures en attente, que ce soit sur « les thématiques environnementales, les demandes sociales, de lamentables accords d’achats de terres à résoudre, la question complexe de la route, le trafic des poids lourds, entre autres. »

La population exige en effet des garanties socio-environnementales, notamment sur la question du transport du minerai. Le projet original avait retenu l’option d’un transport par un minéroduc. Cette disposition a été remplacée par un transport par route. La poussière occasionnée par les allers-retours quotidiens de presque 300 camions de transport de minerai et des véhicules qui transportent des intrants industriels sur une route non goudronnée à quelques mètres des habitations, représente un vrai cauchemar pour les habitants.

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Las Bambas est un des défis principaux que doit relever le gouvernement du nouveau président péruvien Pedro Pablo Kuczynski, élu le 28 juillet 2016.

Pour José de Echave, « Si quelqu’un s’imaginait qu’avec le nouveau gouvernement péruvien, le scénario tendu et conflictuel retomberait, il a eu tort. A plusieurs reprises, nous avions averti que ce gouvernement ne disposait pas de stratégie en matière de conflictualité sociale et que dans ses deux premiers mois rien n’avait été fait. Sa seule annonce concernait l’avance sociale, une mesure qui facilite l’exécution de travaux d’infrastructure de base avant la mise en œuvre des projets miniers, pour que les populations locales voient les bénéfices générés par les projets d’investissement. »

La population exige, dans le cadre de l’Espace de dialogue, que les projets de développement locaux mis en œuvre avec des ressources en provenance de l’activité minière soient conséquents en termes de taille et se situent dans le cadre de plans de développement concertés.

Pour CooperAcción, « Un plus grand effort de tous les acteurs est donc nécessaire pour rétablir des conditions minimales de dialogue et ainsi atténuer les tensions à Cotabambas. Le malaise est énorme dans la zone et les communautés annoncent le début d’une grève provinciale.
La priorité des institutions de l’Etat doit se traduire par une action préventive, multisectorielle, rapprochant l’Etat des régions, qui intègre une claire approche fondée sur les droits et qui reconnaisse que les territoires où se trouvent les investissements ne sont pas des espaces vides« .

CooperAcción exprime des vœux pour que cessent les tensions dans la région et que soient réalisés tous les efforts possibles pour que les demandes légitimes de la population soient exaucées. Un objectif pour l’ensemble du pays devrait être : plus un seul mort de plus pour des conflits sociaux.

Pour en savoir plus :

Pérou : La mine empoisonne la vie des paysans andins, Reportage de Faim et Développement Magazine


Au Pérou, la résistance à l’industrie minière des communautés indiennes, en images

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