Comprendre la colonisation à Jérusalem en trois minutes

Publié le 20.05.2021| Mis à jour le 20.12.2021

Une nouvelle fois, c’est de Jérusalem qu’est parti l’embrasement et la révolte des Palestiniens. Connue pour abriter les lieux saints des trois monothéismes, les Palestiniens y sont soumis à un statut de seconde zone et sont menacés d’expulsion dans plusieurs endroits de la ville.
Pour bien comprendre la situation, voici quelques repères concrets à avoir en tête si vous avez l’impression que le conflit vous dépasse…


Le point de départ de la révolte :
Plusieurs familles du quartier de Sheikh Jarrah, au coeur de Jérusalem Est, la partie palestinienne de la ville, sont menacées d’expulsion imminente par des colons (voir la carte des expulsions dans le quartier de Sheykh Jarra ci-dessous). Des Palestiniens et des activistes Israéliens de gauche manifestent pour s’y opposer

– Les fêtes de fin de ramadan et l’impossibilité pour des milliers de Palestiniens de pouvoir venir prier sur l’Esplanade des mosquées à Jérusalem. Les jeunes palestiniens protestent aussi contre de nouvelles restrictions d’accès à la porte de Damas qui mène à l’Esplanade des mosquées et est aussi un lieu de vie pour les habitants palestiniens de la ville

– Comme chaque année, le 10 mai, les colons et nationalistes israéliens prévoient de parader dans les quartiers palestiniens de Jérusalem lors du Yom Yeroushalaïm (la « Journée de Jérusalem » ), qui commémore la prise de la ville par les forces israéliennes lors de la guerre de 1967. Devant la pression, Netanyahou doit pour la première fois annuler cette manifestation mais la répression des Palestiniens sur l’esplanade des mosquées déclenche les premiers tirs du Hamas depuis Gaza

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Carte des expulsions en cours et planifiées dans le quartier de Sheikh Jarrah

Repères chronologiques : Jérusalem, une ville divisée en deux puis réunifiée de force

1947 : Selon le plan de partage de la Palestine alors sous mandat britannique de l’Onu, Jérusalem doit avoir un statut international à part.

1948 : Première guerre israélo-arabe

1949 : l’armistice sépare la ville en deux de chaque côté de la « ligne verte ». Jérusalem Ouest est sous souveraineté israélienne et l’État d’Israël en fait sa capitale en 1949.
Jérusalem Est est sous souveraineté jordanienne, dont la vieille ville qui abrite la plupart des lieux saints. A cette époque les Israéliens n’ont pas accès au mur des Lamentations.

1967 : Pendant la guerre des Six Jours, Israël conquiert la Cisjordanie, dont Jérusalem-Est. Israël proclame la «réunification» de Jérusalem.

1980 : Israël proclame l’annexion de Jérusalem-Est, peuplée majoritairement de Palestiniens, à Israël.


Jérusalem Est est considéré comme un territoire occupé par la communauté internationale

La communauté internationale considère Jérusalem-Est comme un territoire occupé depuis 1967 et n’a jamais reconnu cette annexion.

Après 1967, c’est à Jérusalem-Est que vont être fondées les premières colonies.

Aujourd’hui l’ONG israélienne Btselem compte plus de 220 000 colons installés à Jérusalem-Est, tandis que 300 000 Palestiniens y sont cantonnés dans des zones de plus en plus limitées.
La partie ouest est elle presque exclusivement peuplée de juifs israéliens (290 000 sur 300 000 habitants).

En 2012, la population totale pour l’ensemble de Jérusalem était de 815 000 personnes.[[Les chiffres concernant Jérusalem proviennent du Jerusalem Institute for Israeli Studies, Jerusalem facts and Tends, 2014.]]

Jérusalem Est isolée de la Cisjordanie par les colonies

Les colonies forment une véritable ceinture qui isole la population palestinienne de Jérusalem du reste de la Cisjordanie. Or Jérusalem est situé au milieu de la Cisjordanie. L’autorité Palestinienne avait prévu d’y établir la capitale de son futur Etat.

Les colonies existantes et la volonté de les étendre et de les développer fait parti du projet de « Grand Jérusalem » des autorités israéliennes. La réunification des colonies entre elles coupe en deux la Cisjordanie et la prive de toute continuité territoriale.

Ce projet enterre de facto la possibilité de création d’un Etat palestinien, celui ci se retrouvant potentiellement à la tête d’un territoire composé de multiples petites entités territoriales isolées les unes de autres.

Un mur ou des murs ?

A l’intérieur et sur le pourtour de Jérusalem, le Mur de séparation est long de 168 km. Seuls 4 km (3%) suivent le tracé de la Ligne verte (ligne de démarcation à l’issue de la guerre en 49 et reconnue comme frontière potentielle). Le reste du tracé passe à l’intérieur des terres palestiniennes. Résultat, plusieurs milliers de palestiniens vivent dans des enclaves encerclées par le Mur et sont menacés d’expulsion.

Près de 160 000 résidents palestiniens sont isolés du reste de la ville par le Mur, restreignant leur accès aux services de base (santé, éducation…).

Les « résidents palestiniens » de Jérusalem poussés au départ

Après la guerre des Six Jours, les Palestiniens qui habitaient Jérusalem Est rejettent la tutelle israélienne et refusent de prendre la nationalité israélienne.

Ils se voient alors dotés d’un statut de « résidents permanents ».

Seuls les Palestiniens possédant ce statut de « résident » sont autorisés à habiter Jérusalem-Est.

De plus en plus difficile à faire renouveler et révocable, cette carte ne leur garantit pas non plus l’accès aux mêmes droits ni aux mêmes services publics qu’aux autres habitants israéliens.

Aujourd’hui les résidents palestiniens de Jérusalem vivent dans la crainte permanente de perdre ce statut et de ne plus avoir le droit de vivre dans la ville.

Le statut de « résident permanent » est en effet soumis à une réglementation de plus en exigeante. Les résidents doivent prouver que Jérusalem est leur lieu d’habitation et de travail. Ceux qui partent à l’étranger perdent leur statut si leur absence dure plus de sept ans.

Depuis 2002, la réunification des familles n’est plus autorisée.
Si un Palestinien de Jérusalem épouse une Palestinienne de Cisjordanie, il perd son statut de résident. Les couples mixtes (l’un résident de Jérusalem, l’autre de Cisjordanie ou d’ailleurs) sont donc obligés de vivre séparés ou de perdre le statut de résident.

Une politique d’urbanisation très restrictive pour les résidents palestiniens depuis 1967

Les colonies séparent les quartiers palestiniens les uns des autres et leur interdisent tout développement.

Étranglés et surpeuplés, les quartiers palestiniens étouffent. 99 % des demandes de permis de construire y sont refusées alors qu’il manque plus de 40 000 logements.

20 000 immeubles construits sans permis sont menacés de démolition, tandis que les colonies, elles, ne cessent de s’étendre.[[Report “East Jerusalem 2015 : Facts and Figures”, Association for Civil Rights in Israel, May 2015 http://www.acri.org.il/en/wp-content/uploads/2015/05/EJ-Facts-and-Figures-2015.pd.]] Il n’est possible d’obtenir des permis de construire que dans des zones extrêmement limitées. Les démarches administratives pour en obtenir un sont très longues (jusqu’à dix ans) et onéreuses (pouvant aller jusqu’à 20 000 €). D’où la prolifération des constructions « illégales ».

La loi sur les propriétaires absents permet à l’État israélien de s’approprier des biens fonciers appartenant à des Palestiniens qui n’ont pas la qualité de résidents de Jérusalem mais qui possèdent un bien foncier à Jérusalem-Est.

Si les résidents palestiniens de Jérusalem forment 36,8 % de la population, l’objectif officiel de la mairie de Jérusalem est de ramener ce chiffre à 30%.[[Cf. Nir Barkat, maire de Jérusalem, déclarait ainsi le 12 janvier 2010 : « Il y a vingt ans, Jérusalem était à 70 % juive et 30 % arabe, ce qui est l’objectif du gouvernement. Aujourd’hui, le ratio est de 65 % et 35 %, ce qui constitue une menace stratégique pour Jérusalem. »]]

Pour aller plus loin :
A Jérusalem, une association d’archéologues israéliens dénonce l’utilisation politique des fouilles

Appel à action pour mettre fin aux expulsions de familles palestiniennes à Jérusalem-Est

Lire aussi :
A Gaza, les bureaux de notre partenaire Filastiniyat bombardés (deuxième témoignage)

Bombardements à Gaza : témoignage d’une « nuit difficile » (premier témoignage)

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