COP 21 : Un accord pour [l’Humanité] ?
La dernière version de l’Accord de Paris rendue publique aujourd’hui et proposée à l’adoption, échoue à assurer la protection des droits des populations. Sans mention des droits humains et de la sécurité alimentaire dans la partie opérationnelle du texte, et avec l’entrée du secteur privé et de ses fausses solutions dans la décision[[qui recouvre les actions pré-2020]], les plus vulnérables qui subissent déjà le plus fortement les dérèglements climatiques risquent désormais de pâtir des actions engagées pour lutter contre leurs effets.
L’Accord relègue tout d’abord la question primordiale des droits humains (dont le droit à l’alimentation) au second plan en l’excluant de l’article 2 (objectifs de l’Accord). « La promotion, le respect et la protection des droits humains devraient pourtant conditionner toute action engagée pour lutter contre les dérèglements climatiques. Il s’agissait de la condition sine qua non pour poser les bases d’un accord juste. Comment peut-on parler aujourd’hui de justice climatique ? Nous devrons faire preuve de vigilance et assurer un suivi des actions mises en oeuvre et de leurs impacts sur les populations locales pour rendre les gouvernements responsables et redevables », déclare Anne-Laure Sablé, chargée de plaidoyer au CCFD-Terre Solidaire.
600 millions de personnes supplémentaires pourraient souffrir de la faim en raison des dérèglements climatiques d’ici à 2080. Or, les Etats ont également renoncé à inclure dans l’article 2 la mention de « sécurité alimentaire », au bénéfice d’une vision dépassée qui met l’accent sur la « production alimentaire ». Ainsi, l’accès, la qualité et la durabilité de l’alimentation ne sont pas pris en compte. « Aberrant, alors que l’on sait que l’on n’a pas besoin de produire plus pour nourrir la planète, mais de produire mieux ! » poursuit Anne-Laure Sablé. « On voit bien qu’en faisant l’impasse sur la sécurité alimentaire, c’est en fait le modèle agro-industriel actuel que l’on cherche à protéger alors qu’il faudrait le remettre en question. Espérons que cette référence à la « production alimentaire » ne tuera pas dans l’œuf les négociations de la COP22, où se dérouleront les premières discussions sur l’agriculture. Ce n’est pas un bon signal, sachant que cette notion conduit à des pratiques qui menacent déjà la souveraineté alimentaire des populations ».
Par ailleurs, l’Accord ouvre la voie à une série de fausses solutions pour lutter contre les dérèglements climatiques et l’insécurité alimentaire. La reconnaissance et l’institutionnalisation du Lima Paris Action Agenda (LPAA) dans le texte, alors même qu’aucun critère clair permettant d’éviter les atteintes à l’environnement et aux droits des populations n’a été défini, pose problème. Des initiatives telles que la Climate Smart Agriculture ou encore le 4 pour 1000 s’inscrivent dans l’esprit de produire toujours plus et de séquestrer plus de carbone. « Loin d’assurer des actions transformationnelles, le LPAA ouvre la voie aux accaparements de terres, aux OGM et autres pratiques relevant du business as usual qui nuisent à l’environnement et aux droits fondamentaux des populations. En installant cet Agenda dans la COP 21, la France a contribué à réduire l’ambition de l’Accord », déclare Maureen Jorand, chargée de plaidoyer au CCFD-Terre Solidaire. « Le LPAA donne l’impression que la COP21 s’est penchée sur le secteur agricole avec des initiatives dédiées, mais il faut rappeler que le mot « agriculture » n’apparait pas une seule fois dans l’Accord ! C’est pourtant un secteur déterminant dans la lutte contre les dérèglements climatiques ».
Dans la même logique, au sein de l’Accord, la question des terres a été traitée sans se préoccuper des populations qui en vivent. En effet, toute référence au « secteur des terres », qui recouvrait la forêt et l’agriculture, assortie de garanties pour les populations, notamment sur le foncier, a été supprimée. Les terres sont devenues de simples « puits et réservoirs de carbone ». « Dans la vision de l’Accord, les terres deviennent de simples outils de stockage et de compensation des émissions. Et elles constituent l’un des éléments clés de la vision à long terme. Mais les terres ne sont pas des calculettes à carbone ! Des populations vivent dessus, en vivent aussi. Comment dès lors les assimiler uniquement à des puits ? Cela ouvre la porte à une financiarisation accrue de la nature et aux accaparements de terre. Surtout cela permettra de dédouaner les plus grands pollueurs qui au lieu de réduire leurs émissions, iront séquestrer du carbone, en particulier dans les pays du Sud », conclut Maureen Jorand.
Contact presse : Karine Appy, 06 66 12 33 02
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