Des alternatives pour les perdants du libre-échange
La Colombie a signé le Traité de Libre échange avec les États-Unis. Son impact sera dévastateur pour les petits paysans.
La Colombie a signé un Traité de libre-échange (TLC) avec Washington le 26 février 2006. Représentant d’une droite très conservatrice, le président Alvaro Uribe a voulu à tout prix signer ce traité. On disait alors que ne pas le signer serait une catastrophe. Mais les discussions ont été uniquement axées sur les grands secteurs économiques du pays : qui allaient gagner ou perdre parmi les cultivateurs de fleurs, de canne à sucre ou les éleveurs de poulets ?
Chacun de ces puissants secteurs a négocié de son côté cherchant à tirer des privilèges. Les aviculteurs ont perdu parce que les USA vont nous envoyer les mauvais morceaux de poulets qu’ils ne consomment pas, à très bas prix. Les secteurs du maïs, du blé, de la canne sont aussi en mauvaise posture. En revanche, ce qui va se passer avec les cultures paysannes a peu compté.
Les petits paysans n’ont pas eu accès aux discussions.
Ils vont être touchés par les brevets sur les semences hybrides et transgéniques qui vont menacer leurs semences traditionnelles. Le gouvernement étant favorable au développement des cultures OGM, nous risquons de perdre les ressources génétiques de générations de paysans.
D’autre part, les USA subventionnent certains produits d’exportation, comme le maïs, qui arrivera moins cher que celui produit par nos paysans. D’une manière générale, le traité va fortifier la Révolution verte avec son paquet technologique.
Les Indiens ont réagi
Beaucoup de paysans ne savent pas bien ce qu’est le TLC. Plus sensibles aux impacts culturels du traité sur leurs traditions, les indiens ont réagi. Dans le Cauca, ils ont organisé un travail de conscientisation qui s’est soldé par un référendum populaire. 90% ont dit non au TLC ! Mais ce résultat n’a aucune importance pour le gouvernement.
IMCA défend une proposition de développement régional durable et intégral, expérimentée et validée dans notre ferme agro-économique. L’IMCA travaille depuis 44 ans avec les paysans de Vallée du Cauca qui ont été repoussés dans les montagnes. Ils sont ouvriers agricoles ou petits propriétaires, cultivant surtout du café, mais aussi des fleurs, des fruits, des tubercules pour l’alimentation, de la canne pour fabriquer à domicile des pains de sucre.
Nous avons renforcé cette économie paysanne par des formations, encourageant un développement économique, social et politique de ces communautés. Après la crise du café, il nous a semblé indispensable de développer des alternatives à cette production, pas seulement à cause de la baisse de cours, mais aussi à cause de la manière de cultiver cette plante en utilisant beaucoup de produits chimiques. Nous avons ainsi accompagné des communautés à produire du café biologique qu’ils exportent. Notre modèle consiste à diversifier la production, fortifier l’auto-consommation, produire sain et propre.
Quand les paysans vont vendre et acheter au marché, ils perdent beaucoup dans la transaction. Depuis que les Argentins nous ont montré les possibilités du troc, nous travaillons à des petites expériences d’échanges sans argent ou à l’aide d’une sorte de monnaie sociale. Récupérer l’importance de cette tradition paysanne est une alternative. C’est aussi un apprentissage pédagogique de la solidarité. Nous tentons maintenant de développer des échanges entre des producteurs ruraux et des consommateurs urbains de quartiers populaires.
Propos recueillis par Cécile Raimbeau
Alfredo Ferro est directeur de l’institut paysan colombien IMCA.
Implantée dans 13 municipalités de la vallée du Cauca, cette organisation jésuite soutient directement 1200 familles.
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