©Sara Pestrianni

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En Algérie, venir en aide aux personnes migrantes sur le chemin du retour

Publié le 21.08.2018| Mis à jour le 14.12.2021

Partenaire du CCFD-Terre Solidaire, Rencontre et Développement est un service social créé dans les années 1970 à Alger par l’Église pour venir en aide aux migrants. Une aide d’autant plus nécessaire que le gouvernement algérien durcit aujourd’hui sa politique d’expulsion.


Si les migrants d’origine subsaharienne, qui arrivaient en Algérie en attendant de pouvoir passer en Europe, vivaient jusque-là dans une très relative tranquillité, leur situation a dramatiquement changé à la fin du mois de septembre 2017.
Depuis qu’une vague d’arrestations, pour ne pas dire de rafles, conduites par les autorités locales dans la rue, sur les chantiers, dans les transports en commun… se traduit par l’expulsion de plusieurs milliers d’hommes, de femmes et d’enfants subsahariens. Des personnes expulsées de manière « dégradante » selon l’ONG de défense des droits humains Human Rights Watch. Elle révèle que les personnes renvoyées à la frontière malienne « ont été rançonnées et attaquées par des groupes terroristes ».

Alors, les migrants toujours présents dans la capitale et les villes alentour préfèrent désormais se terrer. « Le nombre de visites journalières a énormément baissé depuis le début des arrestations, témoigne Lagha Sihem, assistante sociale à Rencontre et Développement. Alors que l’on recevait parfois plus d’une trentaine de personnes par jour, depuis la fin décembre, on n’en reçoit plus que deux ou trois. Parfois aucune. »

Un lieu pour souffler

Bref, la « station-service » tourne au ralenti. La « station service » ? Le surnom du petit bureau de Rencontre et Développement où, depuis les années 1970, les migrants trouvent écoute, aide et soutien. Sur le plan médical tout d’abord. Consultations à l’hôpital, analyses, IRM, scanners, voire opérations, fourniture de médicaments, tout est fait pour prendre en charge et soigner les personnes migrantes, atteintes parfois de pathologies graves : maladies infectieuses, hépatites, VIH. Autant que faire se peut. « On a beaucoup de décès », s’attriste la responsable médicale. « On a enterré cinq personnes l’année dernière, deux cette année. »

Autre « service » rendu par la « station R&D » : la scolarisation et la formation pour que les jeunes ne pâtissent pas trop des « choix de leurs parents ». « L’objectif, en mettant les enfants à l’école ou à la crèche, c’est aussi de leur permettre d’avoir un repas chaud et d’être vaccinés », avoue Lagha. Idem pour les formations proposées aux adolescents et aux jeunes adultes. En esthétique, en informatique et même en marketing/management grâce à « une super directrice qui nous scolarise gratuitement deux élèves par an pour un diplôme qui coûte dans les 6 000 euros l’année ! »


Accompagner ceux qui décident de rentrer au pays

Et puis, il y a ceux qui décident de rentrer au pays. Des retours « volontaires », insiste la jeune femme qui précise : « cet accompagnement commencé il y a 5 ou 6 ans par Rencontre et Développement est aujourd’hui l’une de nos missions phares, la plus demandée [[Ce programme de maisons-relais sur la route du retour est soutenu par le CCFD-Terre Solidaire.]] ».
Renoncement à rejoindre l’Europe, difficulté de trouver du travail, mal du pays et désir de revoir sa famille, envie de reprendre des études grâce un petit pécule amassé… les raisons de vouloir rentrer sont nombreuses, mais le passage à l’acte est loin d’être évident. Tout d’abord, le trajet, qui se compte en milliers de kilomètres et nécessite de traverser le désert algérien. Il y aussi la corruption, les bakchichs à distribuer ici ou là, le racket de certains groupes armés une fois passée la frontière. Pire, la disparition possible.

Des maisons de migrants sur la route du retour


Pour aider les migrants qui veulent rentrer, tout au long de la route, nous travaillons avec des points de relais communautaires. Créées au début des années 2010 avec l’aide d’associations locales, de comités paroissiaux, ces “maisons des migrants” s’échelonnent plus ou moins régulièrement depuis Alger jusqu’au Niger ou au Mali, voire plus loin.
Elles permettent au candidat au retour de trouver un toit, des conseils et, surtout, la sécurité. Lorsqu’un migrant veut partir, nous lui donnons un plan de route qui lui permet de passer de relais en relais, lesquels nous préviennent par mail ou téléphone que la personne est bien arrivée. Et ainsi de suite jusqu’à la frontière.

Résultat : « Cent vingt retours au pays confirmés depuis 2017, notamment à destination de la Guinée et de la Côte d’Ivoire. » Autant de vies sauvées.

Patrick Chesnet

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