En Israël aussi, la population palestinienne est dépossédée

Publié le 22.11.2013| Mis à jour le 08.12.2021

Toute cette semaine, le CCFD-Terre Solidaire accueille deux représentants d’associations palestiniennes d’Israël, qui viennent témoigner des déplacements de populations palestiniennes en cours dans le Néguev (Naqab en arabe) et dans les villes mixtes, comme à Lod ou Saint Jean d’Acre.


On connait la pression de la colonisation en Cisjordanie, qui transforme le territoire palestinien en peau de chagrin. On connait aussi la politique en cours à Jérusalem, qui vise à y limiter la population palestinienne, avec son cortège d’expropriations et de destructions de maisons. Mais on connait moins ce qui passe en Israël même.

Thabet Abu Ras est directeur du bureau du Néguev pour Adalah – Centre légal pour les droits de la minorité arabe. « Dans le Néguev, 70000 Bédouins, les « habitants du désert », vivent dans 35 villages non reconnus qui sont menacés de destruction » explique-t-il. Plus de 30 000 personnes sont menacées d’expulsion. Les populations bédouines qui vivaient dans tout le Néguev ont été déplacées dans les années 50, et regroupées dans une zone du désert éloignée des frontières jugées poreuses de la Jordanie actuelle et de l’Egypte. Les bédouins qui n’ont pas voulu aller s’installer dans les villes ont alors reconstruit des villages qui n’ont jamais été reconnus par les autorités israéliennes, au contraire des implantations juives qui se développaient à la même époque. Un grand nombre de propriétaires des terres bédouines n’ont jamais réussi non plus à faire reconnaitre par les autorités de l’état israélien leurs titres de propriété qui prévalaient au temps de l’empire ottoman et du mandat britannique.

Au prétexte de programmes de reforestation du désert, d’implantation de nouveaux immigrants et de développement économique, le plan « Prawer», en discussion en ce moment au parlement israélien, menace de déposséder les bédouins de 50% de leur terre. Or ce plan a déjà commencé à être mis en œuvre avant même son adoption par la Knesset explique Thabet Abu Ras. 1000 maisons ont été détruites pour la seule année 2011. Sur place, les bédouins s’organisent en refusant les indemnisations dérisoires proposées pour quitter leur maison, et en tentant de reconstruire ce qui a déjà été détruit. « Nous espérons qu’une mobilisation internationale viendra les soutenir » lance Thabet.

A l’autre extrémité du pays, Johayna Saifi, impliquée dans des associations d’éducation populaire, est animatrice communautaire dans la vieille ville de Saint Jean d’Acre. Acre est une des villes mixtes en Israël, nommées ainsi du fait de leur population palestinienne importante. A Acre, la population palestinienne se concentre dans la vieille ville historique. Les quartiers où sont concentrés les Palestiniens font face à des manquements en matière de planning urbain, de services publics et d’infrastructures ainsi qu’à une politique d’éviction et de gentrification. Les bâtiments d’architecture arabe font l’objet d’un véritable engouement chez les promoteurs Israéliens. « Mais les politiques de rénovations urbaines servent de prétexte pour faire partir les familles très paupérisées et fragilisées, et donc en particulier les Palestiniens » raconte Johayna.

Comme l’explique le film de sensibilisation apporté par Thabet « Ce n’est que lorsqu’on saisit la réalité et les motivations de la politique israéliennes des deux côtés de la ligne verte que l’on peut comprendre l’injustice sous-jacente de la dépossession. Avec des cadres légaux différents, mais dans un même objectif, Israël est en train de déplacer des milliers de palestiniens et de violer leurs droits humains fondamentaux ».

A l’occasion de la visite de François Hollande en Israël, la plateforme des ONG françaises pour la Palestine interpelle le gouvernement sur les menaces d’expulsion pesant sur les bédouins du Néguev. Chacun peut manifester son opposition à ce plan en écrivant à François Hollande

Le 30 novembre, les Palestiniens appellent à une journée de mobilisation internationale contre le Plan Prawer. Les comités de soutien sont invités à organiser des marches, des manifestations, des lettres de protestation.

« Il ne reste qu’à trouver la volonté », conclut Thabet.

Anne-Isabelle Barthélémy

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