En RDC, l’Eglise engagée pour le contrôle de la gestion des ressources naturelles

Publié le 09.01.2015

En République Démocratique du Congo, les conflits qui minent le pays depuis 20 ans s’alimentent de l’exploitation des ressources naturelles. À l’Est, les minerais sont l’objet de la convoitise de groupes armés et de trafiquants qui prospèrent sur le pillage du pays. Massacres, travail forcé, viols de masse ; plus qu’ailleurs, les minerais congolais ont un goût de sang.


De manière plus générale, dans tout le pays, la faiblesse de l’État, les lacunes de la loi et la corruption généralisée font que les ressources naturelles riment avec dégradation de l’environnement, violation des droits des communautés locales. Alors que le pays est riche en ressources, les populations sont parmi les plus pauvres du monde. Face à ces drames, les défis sont énormes et les enjeux multiples. Comment mobiliser les populations et les informer sur leurs droits ? Comment produire une expertise sur les ressources naturelles et dénoncer le scandale ?
Comment porter une parole forte en RDC mais aussi au niveau international et agir ainsi pour la justice dans un contexte de violence ? C’est la mission de la CERN, partenaire du CCFD-Terre Solidaire.

La Commission épiscopale pour les ressources naturelles
(émanation de la Conférence épiscopale nationale du Congo) est depuis 2007 un acteur engagé dans le combat pour une gestion durable des ressources naturelles du pays.
Plus qu’un organe technique qui fournit des analyses et de l’information aux évêques et qui mène un plaidoyer pour faire avancer la loi en matière de gestion des ressources naturelles, c’est un acteur engagé au service des Congolais qui voient les richesses de leur pays leur échapper et, pire encore, alimenter les conflits qui ravagent depuis 20 ans l’est du Congo.
Basée à Kinshasa, la CERN déploie son action au niveau national mais aussi au niveau local via ses observatoires des ressources naturelles à Boma (Bas Congo), Goma (Nord-Kivu) et Bukavu (Sud-Kivu).

Le désir de changer les choses

C’est dans cet observatoire que Florence Furaha, trentenaire, travaille depuis 2010. Après avoir travaillé à la réinsertion socio-psychologique des personnes victimes des violences sexuelles et des violences faites aux femmes au Sud-Kivu, cette juriste de formation a rejoint l’organisation pour faire un travail de suivi de l’exploitation des ressources naturelles sous plusieurs angles : respect des droits humains, évaluation de l’impact de l’exploitation des ressources naturelles sur les conditions des vies des populations, gestion des recettes perçues par les autorités, application des différents textes légaux…
« L’objectif de notre travail est de promouvoir une exploitation des ressources naturelles respectueuse des droits de l’homme » explique celle qui est aussi défenseur judiciaire auprès du tribunal de grande instance de Bukavu.
À ses yeux, l’une des forces de la CERN est de « s’impliquer à tous les échelons de la gestion des ressources naturelles en commençant par les communautés directement affectées par leur exploitation et de travailler en synergie avec les autres acteurs locaux à la formulation de solutions concrètes ».
Dans cette région en conflit, auprès des communautés vivant dans la misère, l’enjeu est de taille.
Florence a toujours eu le désir de vouloir changer les choses. Particulièrement en poussant les institutions à travailler pour le bien de tous et non pour le bénéfice de quelques individus qui profitent de leur pouvoir.
« J’ai rencontré des personnes vulnérables et très pauvres et pourtant la richesse dont le pays dispose est incommensurable. Je veux comprendre pourquoi il est difficile d’instaurer une justice distributive dans notre système et essayer d’éveiller la conscience des communautés, leur faire connaître qu’elles ont des droits et des obligations et essayer de tisser un lien de cohabitation pacifique et gagnant-gagnant entre les parties prenantes ».

Déplacer des montagnes

Cette mère de famille connaît les difficultés et les risques qu’encourent les défenseurs des droits : « Actuellement être engagé en RDC, c’est avoir un coeur blindé, de grands yeux pour voir d’où vient le danger, des oreilles toujours tendues et des jambes habiles pour courir ! ».
Cet engagement militant, elle le partage avec les chargés de mission du CCFD-Terre Solidaire et les bénévoles qu’elle a rencontrés lors de ses voyages en France (« des gens de bien qui s’engagent à aider ceux qui aspirent au changement positif dans le monde »).
Au-delà de la dureté des conditions de vie et de travail, des dangers et des immenses défis que connaît l’est du Congo, Florence est pleine d’espoir et quand on lui demande ce qu’elle aime dans ce Sud-Kivu elle répond « les collines et le palais de justice de Bukavu »… La Justice toujours, celle qui permet de déplacer des montagnes…

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