Journée de la terre 2021 : un espoir pour la défense de l’environnement en Amérique latine
En Amérique Latine, la lutte pour la protection de l’environnement oscille entre deuils, préoccupations et espérance. En cette Journée de la Terre, Walter Prysthon, responsable du service Amérique Latine et Caraïbes au CCFD-Terre Solidaire, nous explique pourquoi l’Accord d’Escazu est une bonne nouvelle pour les défenseurs et défenseuses de l’environnement.
Les injustices et les violences contre les défenseurs de l’environnement en Amérique latine sont encore trop nombreuses. En Colombie, au Guatemala, au Brésil, au Pérou, le nombre de militants sociaux assassinés ne cesse d’augmenter, endeuillant les communautés et les sociétés, aujourd’hui aussi frappées par la covid-19.
La recherche du profit à court terme renforce les politiques extractivistes qui détruisent l’environnement et rend vulnérables les opposants aux mégaprojets.
Dans ce contexte, l’entrée en vigueur de l’Accord d’Escazu, en ce jour symbolique de la journée de la terre du 22 avril 2021, représente une espérance.
C’est aussi une manière de rendre hommage aux défenseuses et aux défenseurs qui, au quotidien, risquent leur vie face à des intérêts économiques puissants.
Du nom de la ville costaricaine où il a été adopté en 2018, l’Accord d’Escazu a pour objectif de garantir l’accès plein et effectif des citoyens à l’information en matière de projets environnementaux ; la participation publique dans des processus de prise de décision ; et l’accès à la justice en matière environnementale.
Il s’agit du premier accord régional latino-américain et caribéen contraignant en matière environnementale. Cet accord ouvre aussi la voie pour des mécanismes de coopération entre les pays. Et surtout, il contient des dispositions spécifiques sur les défenseurs des droits humains engagés sur des questions environnementales qui les protègent et encouragent dans leur travail.
Les contenus de l’Accord sont en cohérence avec des dispositifs déjà existants comme la Convention 169 de l’Organisation International du Travail, sur le droit de consultation préalable des peuples indigènes sur des projets envisagés sur leurs territoires, ainsi qu’avec la revendication du renforcement du devoir de vigilance des entreprises en matière de droits humains et d’environnement.
Au regard des dispositions de l’Accord concernant la garantie d’un « environnement favorable au travail des personnes, associations, organisations ou groupes qui œuvrent en faveur de la protection de l’environnement », des situations comme celle de Bernardo Caal Xol, leader maya Q’eqchi, injustement maintenu en prison depuis plus de trois ans au Guatemala, ne seraient peut-être pas envisageables.
En effet, dans le cadre d’un conflit opposant 124 communautés à une entreprise porteuse du projet de construction de deux centrales hydroélectriques sur les fleuves Oxec et Cahabón, Bernado Caal Xol a été condamné, en absence de preuves et sans un procès équitable, à plus de 7 ans de prison.
Ce cas – malheureusement pas unique en Amérique latine – relève d’une utilisation indue du droit pénal en faveur d’intérêts économiques, et vise à intimider et affaiblir les mouvements de contestation. Ce type de procédé a été dénoncé à plusieurs reprises par des organismes tels que la Cour Interaméricaine de Droits Humains.
Sans doute, le sort de Bernardo Caal Xol pourrait être tout autre, si l’accord existait déjà à l’époque et s’il était ratifié par le Guatemala… Les communautés Q’eqchis auraient eu accès, dans leur langue, à l’information pertinente sur le projet avant sa mise en œuvre ; elles auraient été consultées ; leurs droits protégés ; leurs leaders n’auraient pas été criminalisés ; des tribunaux spécialisés avec des fonctionnaires formés se seraient saisis du cas pour un jugement équitable qui ne traîne pas en longueur.
En offrant aux défenseurs de l’environnement des garanties d’accès à l’information et de recours à la justice, les Etats ayant ratifié l’Accord d’Escazu font un pas considérable pour protéger les générations futures. La reconnaissance des défenseurs de l’environnement participe au renforcement de la démocratie et de l’Etat de droit.
En cela, l’Accord d’Escazu laisse entrevoir la possibilité d’une autre voie pour la résolution des conflits socio-environnementaux, et représente un espoir pour les communautés paysannes et indigènes aujourd’hui encore assez démunies pour faire valoir leur droit au territoire et à un environnement sain.
Walter Prysthon
Responsable de Service Amérique latine – Caraïbes
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