Le corps d’une femme n’est pas une marchandise

Publié le 10.11.2010| Mis à jour le 07.12.2021

La traite d’êtres humains, principalement celle de femmes, est en constante progression en Argentine. Plus visible, notamment grâce au travail de sensibilisation mené par des organisations de lutte contre les violences faites aux femmes, ce fléau prospère en raison de mentalités masculines rétrogrades et la collusion des pouvoirs politique, policier et judiciaire.


Le corps d’une femme n’est pas une marchandise

La traite d’êtres humains, principalement celle de femmes, est en constante progression en Argentine. Plus visible, notamment grâce au travail de sensibilisation mené par des organisations de lutte contre les violences faites aux femmes, ce fléau prospère en raison de mentalités masculines rétrogrades et la collusion des pouvoirs politique, policier et judiciaire.

« La traite d’êtres humains, et plus particulièrement celle des femmes à des fins d’exploitation sexuelle, est le deuxième secteur économique le plus lucratif au monde après le narcotrafic et devant celui des armes » s’insurge , lors d’un passage au mois d’octobre à Paris, Carlos Miguel Zagni, membre de Accion educativa, partenaire du CCFD-Terre Solidaire, et secrétaire exécutif du programme Mercosur social et solidaire*.

Selon l’Organisation internationale du travail (OIT), la traite d’une mineure peut générer un profit atteignant jusqu’à 130 000 dollars par an. « Par traite nous entendons toute la chaîne d’un long circuit. Il démarre par le « marquage », c’est-à-dire le dépistage des potentielles victimes (en général des jeunes filles jolies, pauvres, fragiles, en quête de travail…), il se poursuit par leur recrutement fondé sur des promesses d’emploi trompeuses, puis l’extraction de leur environnement familial et social, leur vente**, leur transfert vers le lieu de travail et enfin l’accueil, les violences, souvent la drogue et l’exploitation… » explique Maria Rosa Goldar, présidente de la Fundacion ecumenica de Cuyo (FEC), partenaire du CCFD-Terre Solidaire.

« Ce circuit est très sophistiqué dans la mesure où chaque maillon est indépendant. Il est par conséquent très difficile à démanteler » précise Carlos Miguel. Six cents jeunes femmes, âgées de 19 à 24 ans, auraient disparu en Argentine au cours de l’année 2009, victimes de la traite.

Le pays est grand, il s’agit principalement de déplacements internes. Mais de nombreuses étrangères, notamment originaires du Paraguay, arrivent par la zone de la triple frontière au nord du pays. Ce phénomène en constante progression est notamment dû  à une  forte augmentation des flux migratoires.

Les zones pétrolières, minières, portuaires et de l’industrie du soja représentent les principales lieux d’exploitation. Là où beaucoup d’hommes vivent seuls, où la prostitution prolifère mais aussi dans certains secteurs économiques déficitaires en main d’œuvre, comme l’industrie textile.

Sans oublier les régions touristiques, parmi lesquelles celle de San Javier réputée pour son gibier qui attire de nombreux Français férus de chasse…

Prévention, sensibilisation et plaidoyer

Pour lutter contre ce fléau, il existe bien une loi qui depuis quatre ans reconnaît la traite comme un délit pénal. Mais la tradition patriarcale, les mentalités masculines et les logiques économiques ont la peau dure. « Pour beaucoup d’hommes argentins, les femmes se prostituent par plaisir.

De plus, ils ne font pas le lien entre traite et prostitution » explique Maria Rosa. La FEC, Accion educativa et d’autres mènent donc des actions de sensibilisation en distribuant des prospectus rappelant que le corps d’une femme n’est pas une marchandise ; destinés aux consommateurs, mais aussi aux « rabatteurs » comme les employés d’hôtels, les chauffeurs de taxis…

La prévention en milieu scolaire, dans les centres de santé, dans les quartiers sensibles est le deuxième volet d’action des associations. Enfin, un travail essentiel de plaidoyer est en cours. « La loi en vigueur est trompeuse, dénonce Maria Rosa. Son point le plus controversé est sa définition du consentement de la victime. En effet, une mineure est automatiquement reconnue victime de traite. En revanche, pour une jeune femme de 19 ans, majeure, c’est à elle que revient la charge de la preuve. Or il est extrêmement difficile d’apporter les preuves en cas de traite. »

D’autre part, la connivence entre pouvoirs politique, policier et judicaire, sur fond de corruption, entrave les contrôles et l’application de la loi. « La traite est un « business » régional qui requiert une stratégie de lutte au niveau régional, ajoute Carlos Miguel. 

Nous sommes donc en train de constituer un programme de prévention pour la zone Mercosur. » Enfin, dernière étape du soutien aux victimes : l’aide à la réinsertion. « C’est la phase la plus difficile. D’autres associations avec qui nous travaillons ne se consacrent qu’à cet aspect là » conclut Maria Rosa. 

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