Les Roms, boucs-émissaires d’une politique sécuritaire

Publié le 16.02.2012| Mis à jour le 08.12.2021

Chaque année le Collectif National Droits de l’Homme Romeurope dénonce la stigmatisation et les discriminations dont sont victimes les quelques 20 000 Roms vivant ou séjournant en France en situation de grande précarité.

Les positions prises publiquement en cet été 2010 par le chef de l’Etat, relayé par divers ministres et responsables politiques, officialisaient une inacceptable ethnicisation des choix politiques dans un non moins inacceptable amalgame Roms/Gens du voyage. Dans un contexte d’exacerbations des questions sécuritaires et d’immigration, un bouc-émissaire était créé, les Roms et particulièrement ceux originaires de Roumanie, étaient désignés comme délinquants et asociaux, prêts à envahir la France pour bénéficier d’avantages sociaux auxquels ils n’ont pas accès ! Ce discours politique aux accents xénophobes a attiré l’attention des médias, de la société civile et même des institutions européennes et internationales qui ont dénoncé l’attitude du gouvernement français.   Le renforcement des politiques de rejet Ces politiques combinent différentes pratiques, qui sont toutes aussi iniques les unes que les autres : La reconduction des mesures transitoires prévues par le traité d’adhésion de la Bulgarie et de la Roumanie, maintenant hors du marché du travail français les ressortissants de ces deux seuls pays européens, surtout les plus pauvres et moins qualifiés ; La priorité accordée à l’éloignement avec la distribution massive d’OQTF (Obligation à Quitter le Territoire Français) et sous cou-vert d’aide au retour humanitaire ; La systématisation ciblée des pratiques de fichage. Le fichier OSCAR qui vise tous les étrangers ayant bénéficié d’une aide au retour dite volontaire (ARV) ou humanitaire (ARH) revêt d’évidence un caractère discriminatoire. Dans plus de 80% des cas enregistrés sur OSCAR, les données biométriques concernent  des citoyens de l’Union européenne de nationalité roumaine ou bulgare et, de fait, des Roms. La mise sur pied d’un arsenal juridique spécifique. Celui-ci veut limiter le droit au séjour (mesures d’éloignement étendues aux personnes résidant depuis moins de 3 mois sur le territoire), restreindre le droit de circulation (invention de la notion d’ « abus du droit de libre-circulation »), faciliter les évacuations des squats et terrains occupés de manière « illicite » et interdire la mendicité (arrêtés préfectoraux prévoyant la reconduite à la frontière des étrangers, européens ou non, pratiquant la « mendicité agressive »). La multiplication des violences de tous ordres : stigmatisation, évacuations de terrain systématiques, brutales et suivies de la destruction des biens personnels, harcèlement policier attesté par de nombreux observateurs et par les victimes elles-mêmes. Ces pratiques qui visent directement les migrants Roms, concernent aussi les autres personnes qui, pour une raison ou pour une autre, vivent en situation de grande précarité. Les Roms seraient-ils les cobayes d’un dispositif anti-pauvres en cours de construction ?  

De la marginalisation accrue des migrants Roms a la mobilisation de la société civile

Ces politiques à la fois discriminatoires et répressives autant qu’inefficaces ont des répercussions très néfastes sur les migrants Roms qu’elles visent au premier chef. A la stigmatisation s’ajoute en effet une précarisation accrue des conditions de vie, liée aux difficultés de plus en plus grandes pour accéder aux prestations sociales, aux évacuations à répétition et aux interruptions de suivi sanitaire, scolaire et social qu’elles impliquent, ainsi qu’aux difficultés voire à l’impossibilité effective d’accéder à l’emploi salarié à cause des mesures transitoires. Ces situations dramatiques n’ont pas laissé la société civile indifférente. Au contraire, des résistances se sont organisées. Grâce à la mobilisation citoyenne, des comités de soutien se sont créés et associés aux organisations humanitaires et de défense des droits pour apporter une aide régulière aux personnes en détresse, inter-peller les pouvoirs publics et développer des projets d’insertion avec quelques collectivités locales volontaires. Des solutions sont possibles dès lors que l’Etat réaffirme l’égalité des droits et pro-pose un traitement adapté à chaque situation individuelle.         

Les revendications prioritaires de Romeurope

Le Collectif National Droits de l’Homme Romeurope rappelle que les Roms séjournant ou vivant en France en situation de précarité ont des droits auxquels il importe de leur donner un accès effectif, en arrêtant les pratiques, souvent abusives, qui les restreignent ou s’y opposent. Ce sont ces revendications portées localement par les comités et les associations, que le CNDH Romeurope défend à l’échelle nationale et européenne. Pour l’essentiel il s’agit de : –    LEVER IMMEDIATEMENT LES MESURES TRANSITOIRES qui limitent l’accès au travail ; –    SUPPRIMER LES PROCEDURES ADMINISTRATIVES ET JURIDIQUES comme la distribution d’OQTF motivées sur l’« abus de droit » QUI PORTE ATTEINTE AU DROIT AU SE¬JOUR ; –    RENDRE, de ce fait,  EFFECTIF L’ACCES AU DROIT COMMUN ; –    ARRETER IMMEDIATEMENT LES EXPULSIONS DE TERRAINS sans aucune proposition d’hébergement et prendre les mesures pour garantir un habitat digne ; –    PERMETTRE UN ACCES PLEIN ET EFFECTIF A LA SCOLARISATION POUR LES ENFANTS Roms vivant en squat et bidonville et assurer leur protection en application de la convention internationale de l’enfant signée par la France ; –    GARANTIR L’ACCES AUX SOINS ET A LA PROTECTION DE LA SANTE : une attention particulière doit être accordée à la prévention, à la vaccination des enfants et au dépistage des maladies infectieuses et chroniques. Le site internet de Romeurope Télécharger le rapport (pdf)

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