Paquet énergie-climat : les pays pauvres font les frais de la politique européenne sur les agrocarburants.

Publié le 03.01.2009| Mis à jour le 09.09.2021
Associés dans la campagne « Les agrocarburants, ça nourrit pas son monde », le Comité catholique contre la faim et pour le développement, Oxfam-France Agir-Ici et Les Amis de la Terre dénoncent d’ores et déjà les conséquences désastreuses sur les pays pauvres de l’adoption de l’objectif de consommation massive d’agrocarburants.  Alors que le Paquet énergie-climat est aujourd’hui dans sa phase finale de négociation au niveau du Conseil européen, la directive porte à 20 % la part d’énergie renouvelable que les pays européens s’engagent à atteindre en 2020, dans leur bouquet énergétique global. Cette décision cache malheureusement l’objectif spécifique, dans le secteur des transports, d’incorporer 10 % d’agrocarburants dans les carburants fossiles, qui va accélérer la ruée des entreprises européennes vers les terres dans les pays du Sud, avec l’appui des gouvernements de ces pays, au détriment du droit à l’alimentation des populations les plus démunies. Les pays pauvres paieront pour la politique énergétique de l’Union européenne Les Amis de la Terre, le CCFD–Terre solidaire et Oxfam France–Agir ici dénoncent le chantage réalisé jusqu’au dernier moment par certains Etats membres, menaçant, avec succès, de bloquer les négociations sur l’ensemble de la directive, si l’objectif de consommation d’agrocarburants était revu à la baisse.   « En menant la campagne « Les agrocarburants, ça nourrit pas son monde », nos organisations ont montré que l’extension des plantations destinées à satisfaire le marché énergétique européen entre en concurrence avec les terres, l’eau, les crédits dont a besoin l’agriculture familiale, à un moment où sa relance est plus que jamais nécessaire. En pleine crise alimentaire et alors que 963 millions de personnes souffrent de la faim dans le monde, il est intolérable que l’Union européenne externalise les effets négatifs de sa politique énergétique sur les pays du Sud, tout en qualifiant ces agrocarburants de « durables » », affirme Ambroise Mazal, du CCFD – Terre solidaire. L’exemple tanzanien En Tanzanie, presque la moitié des terres a été désignée apte à la production d’agrocarburants. Des tensions apparaissent déjà entre les communautés et des investisseurs. Un millier d’agriculteurs du bassin de Wami – une zone rizicole – sont, par exemple, obligés de défricher la terre pour faire de la place à un investisseur suédois voulant développer 400 000 hectares de canne à sucre. Au Cameroun, trois sociétés liées à un groupe français assurent environ 80 % de la production nationale d’huile de palme, et préfèrent se détourner de l’usage alimentaire pour viser le marché de l’agrodiesel, plus rentable. Ces sociétés mobilisent 40 000 hectares aujourd’hui, malgré les protestations des villageois qui, en l’absence de titre foncier officiel, voient leurs cultures vivrières menacées. Au Bénin, malgré les problèmes de forte densité de population sur les terres fertiles de ce petit pays, une entreprise italienne a obtenu l’appui du gouvernement pour l’exploitation de 250 000 hectares de tournesol.   « Nous regrettons particulièrement la position défendue par la Présidence française de l’Union européenne, au nom des chefs d’Etat européens, dans la négociation tripartite avec le Parlement et la Commission.  Alors que les impacts négatifs soulevés par la campagne « Les agrocarburants ça nourrit pas son monde » sont admis par la plupart des interlocuteurs rencontrés au sein du gouvernement français, et malgré les mises en garde des agences des Nations unies spécialisées ou des institutions internationales [1], la France, qui menait les négociations, a fait la sourde oreille. » poursuit Sébastien Godinot, des Amis de la Terre. Les lobbies agricoles plutôt que la lutte contre la faim « Le gouvernement français n’a pas  soutenu l’instauration des gardes fous proposés par le Parlement européen, nécessaires pour prévenir la déforestation, protéger le droit à l’alimentation, éviter les déplacements forcés de populations et protéger les droits des peuples indigènes. Au contraire, la France s’est crispée sur le maintien de l’objectif de 10%, rejoignant en cela des pays producteurs d’agrocarburants tels que l’Espagne, l’Italie ou l’Allemagne, privilégiant les intérêts à court terme de leur lobbies agricoles plutôt que la lutte contre la faim dans le monde. » conclut Jean-Denis Crola, d’Oxfam France – Agir ici.   A l’heure où la France et l’Union européenne se mobilisent pour apporter une réponse à la crise alimentaire, nous déplorons le fait que leurs politiques énergétiques se fassent au détriment de la lutte contre la faim dans le monde. Les Amis de la Terre, le CCFD–Terre solidaire et Oxfam France–Agir poursuivront leur campagne pour s’opposer à cette politique européenne irresponsable, rejeter les agrocarburants au rang des fausses solutions à abandonner, et promouvoir les diverses alternatives existantes.   [1] Voir les rapports de l’organisation des Nations unies pour l’agriculture et l’alimentation (FAO), du Programme alimentaire mondial (PAM), de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international (FMI) ou encore de l’OCDE.   Contacts presse : Lisez le communiqué. Retrouvez la réaction des alliés du CCFD à la campagne pour la promotion de l’éthanol à base de betteraves.

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