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Réponse de François Hollande

Publié le 11.04.2012| Mis à jour le 09.09.2021

Le candidat François Hollande a répondu au questionnaire du CCFD-Terre Solidaire par une lettre dont nous vous présentons ci-dessous les principaux extraits qui nous ont permis de remplir le tableau.


En finir avec l’évasion fiscale pour apporter une réponse juste à la crise de la dette

Votre dossier met en avant et je partage cette priorité, la nécessité de promouvoir bien plus fortement la transparence des flux financiers internationaux, pour lutter d’une part contre les dérives d’une finance dérégule, mais aussi combattre avec beaucoup plus d’efficacité la fraude et l’évasion fiscales. La corruption est à l’évidence susceptible de prospérer grâce aux paradis fiscaux et à l’opacité de la finance. Elle détourne des trésors publics des fonds qui seraient indispensables au financement du développement, tout en déstabilisant les efforts de construction démocratique en rendant possibles des financements illégaux des vies politiques nationales. Ce déficit de transparence ne se limite pas aux flux financiers entre Nord et Sud, mais il est vrai qu’il est particulièrement insupportable quand il prive les citoyens de pays en développement de ressources publiques dont ils auraient tant besoin. 

Le candidat Hollande partage largement le constat dressé par le CCFD-Terre Solidaire sur les impacts délétères de l’opacité financière et des paradis fiscaux à la fois sur le pillage des budgets des Etats et sur la stabilité du système financier.

Il insiste sur l’injustice fiscale et les enjeux démocratiques que posent la corruption et l’évasion fiscale. Et il constate que ce fléau est un défi à la fois pour les pays en développement et pour les citoyens des pays riches également.

C’est pourquoi je suis favorable à ce que les grandes entreprises cotées en France publient leurs comptes détaillés pays par pays, quel que soit leur secteur d’activité, et non pas seulement dans les secteurs extractifs et forestiers. Je note que les Etats-Unis se sont engagés dans cette direction et je plaiderai pour que cet effort de transparence soit partagé avec autant de pays que possible. Si je suis élu président de la république, je compte faire des enjeux de régulation, de transparence, de lutte contre l’évasion et la fraude fiscale des sujets majeurs des prochains G8 et G20.

François Hollande soutien la proposition phare du CCFD-Terre Solidaire de transparence pays par pays dans les comptes des entreprises multinationales pour lutter contre l’évasion fiscale. Nous ne manquerons pas de lui rappeler cet engagement s’il est élu.

Néanmoins, il ne s’engage pas précisément sur la mise en œuvre concrète de cette proposition. S’il indique qu’il tentera de convaincre d’autres pays, il ne dit pas que la mesure pourrait s’appliquer en France immédiatement pour toutes les entreprises qui bénéficient de marchés ou d’aides publics.

C’est dans cet esprit qui j’ai apporté on soutien à l’Initiative pour la Transparence des industries extractives ou encore la campagne « Publiez ce que vous payez ».

« Je continuerai évidemment demain, à soutenir les initiatives permettant les échanges d’information fiscales entre pays lorsque cela s’avère nécessaire pour lutter contre la fraude fiscale. Les listes de paradis fiscaux ou propices au blanchiment devront être régulièrement revues, pour autoriser des réponses plus fermes contre ces fléaux. »

François Hollande constate, comme le CCFD-Terre Solidaire que le contour des listes de paradis fiscaux et de territoires propices au blanchiment d’argent doit être revu pour renforcer le dispositif actuel. Dans sa réponse, il semble faire davantage allusion à la liste du G20 et du GAFI plutôt qu’à la liste française (sur laquelle se basent les mesures en vigueur de transparence et les sanctions appliquées aux banques).

François Hollande ne se prononce pas sur les propositions 2 et 3 du Pacte pour une Terre Solidaire : consacrer plus de moyens pour renforcer les administrations fiscales des pays du Sud et exiger un échange automatique d’information de la part des intermédiaires financiers, en demandant aux banques qui opèrent en France de dévoiler leurs relations avec des contribuables français à l’étranger.


Instaurer la responsabilité juridique des entreprises multinationales
vis-à-vis de leurs filiales

« Je partage votre volonté de responsabiliser les grandes entreprises face aux actions de leurs filiales, en matière de droits humains comme environnementaux, dans le respect évident des législations nationales. »

François Hollande affirme partager la nécessité d’une responsabilisation des groupes de sociétés, cependant il ne propose pas de mesures concrètes pour rendre juridiquement contraignant le devoir de la société-mère de prévenir et réparer les dommages ou les violations provoqués par leurs filiales à l’étranger. Le contexte économique mondialisé a montré les limites des législations nationales, bien souvent trop fragiles dans les pays du Sud, et la nécessité d’une régulation plus contraignante au niveau des pays dans lesquels les sociétés-mères sont domiciliés. Ce constat a été par ailleurs inscrit dans les Principes directeurs des Nations unies relatifs aux droits de l’Homme et aux sociétés transnationales, adoptés en 2011, et qui invitent les Etats à adapter le droit des sociétés au nouveau contexte de la mondialisation.

« Il va de soi que les entreprises qui bénéficient de financements d’institutions publiques françaises doivent être tenues à des diligences très strictes en matière sociale, environnementale ou de respect des droits humains».

François Hollande considère que les entreprises bénéficiaires de financements publics français doivent être soumises à des diligences strictes, ce qui va dans le sens de nos propositions. Le CCFD-Terre Solidaire faisait plus spécifiquement référence à la notion de diligence raisonnable en matière de droits humains , : cette dernière exige des Etats, lorsque leurs institutions publiques accordent des subventions à des entreprises, qu’ils veillent à ce qu’elles aient mis en œuvre de telles procédures, en amont et non pas en aval, de la décision de financer un projet.

Réguler et encadrer les marchés agricoles pour assurer la souveraineté alimentaire

« […] Votre courrier mentionne les dégâts que fait la spéculation sur les marchés agricoles. Vous avez raison : nous vivons un moment particulièrement inacceptable où les producteurs sont peu rémunérés, de surcroît de manière très aléatoire, et les consommateurs pénalisés par des prix finaux eux-mêmes très élevés. Comme je l’ai déjà exprimé précédemment, il me semble nécessaire de maîtriser tous les facteurs de déstabilisation des marchés. Le métier agricole ne doit pas être dépendant du métier de trader. Je suis favorable à des mécanismes de stabilisation dont certains, à l’image des quotas laitiers, ont été supprimés. Je veux préserver les mécanismes de régulation de l’offre avec des mécanismes d’intervention sur les marchés. Je souhaite également encadrer les recours aux agro-carburants (notamment de première génération), car la corrélation des prix agricoles aux prix énergétiques accentue à l’évidence la volatilité des prix, notamment des denrées alimentaires. » 

  1. François Hollande pointe du doigt la nécessité d’agir sur les facteurs de déstabilisation des marchés de matière première et la nécessité de distinguer agriculteur et trader. Cependant, le candidat du parti socialiste ne précise pas quels facteurs menacent aujourd’hui la stabilité des marchés de matières agricoles – à savoir notamment les pratiques des spéculateurs ou la faiblesse des autorités de marchés, soulignés dans les propositions du CCFD-Terre Solidaire.
  2. Concernant les mécanismes à même d’encadrer les marchés internationaux, François Hollande ne se prononce pas sur des mesures au niveau international. Il fait uniquement référence au niveau européen et seulement sur des mécanismes d’encadrement de l’offre (quotas laitiers) et ne mentionne pas les impacts de la volatilité des prix agricoles sur les pays du Sud. Sa réponse ne recouvre donc pas la proposition du CCFD-Terre Solidaire qui traitait de mécanismes au niveau international tels que les stocks de régulation.
  3. Bien qu’il souligne les impacts de la volatilité des prix, tant sur les producteurs que les consommateurs, François Hollande n’évoque pas la transparence de l’ensemble des acteurs du secteur agricole (Etats, groupes agro-industriels…) sur les productions et les stocks. Une telle transparence serait nécessaire pour réduire les incertitudes et distorsion sur les marchés, qui favorisent la variation des cours.
  4. Sur la question des agrocarburants, François Hollande fait part de son souhait d’encadrer le recours à cette énergie ; mais sans préciser le levier. Le CCFD-Terre Solidaire appelait le candidat à s’engager, notamment au niveau européen, pour un arrêt des politiques d’incitation à la production et d’incorporation d’agrocarburants de première génération. Si la formulation du candidat sous-entend la certification, le CCFD-Terre Solidaire souhaite rappeler qu’aujourd’hui aucun mécanisme n’est en capacité de prendre en compte l’ensemble des impacts de ces cultures (sur la sécurité alimentaire, l’environnement, les prix agricoles, le développement rural, …)

Respecter les droits des migrants

Le candidat François Hollande a fait le choix de ne pas répondre au questionnaire envoyé par le CCFD-Terre Solidaire et portant sur 16 mesures précises. Il a cependant fait parvenir une lettre dont nous vous présentons ci-dessous la totalité des extraits inhérents à la question du respect des droits des migrants.

« Enfin, ainsi que je vous l’indiquais lors de notre rencontre, je considère que la politique de « conditionnalité migratoire » à l’aide au développement a échoué, comme le reconnait d’ailleurs le candidat sortant puisque le Ministère de l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du développement solidaire a été supprimé, trois ans à peine après sa création en 2007. Les activités de développement qui y étaient suivies seront donc, si je suis élu Président de la République, transférées au dispositif de coopération. »

François Hollande affirme partager la nécessité de dissocier le contrôle des flux migratoires et la coopération au développement et rejette la conditionnalité de l’aide. Il fait un lien entre l’échec de cette approche et la suppression du Ministère de l’immigration, pourtant les accords de gestion concertée n’avaient pas été signés par ce feu-ministère mais par le Ministère de l’Intérieur ; et malgré la suppression du Ministère de l’immigration, ces accords sont à ce jour toujours en vigueur.
Alors que le projet du PS affirmait clairement vouloir abroger ces accords, François Hollande ne se positionne pas clairement dans ce sens.
Par ailleurs, il ne se prononce pas sur la question de la ratification de la convention des Nations Unies pour la protection des droits des travailleurs migrants, ni sur la nécessité d’encourager une approche multilatérale nord – sud des migrations.

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