Sondage, « Les Français et la lutte contre la faim dans le monde »

Publié le 15.10.2013| Mis à jour le 10.09.2021

Le sondage CSA/CCFD-Terre Solidaire/La Croix. Les résultats, publié ce jour, indiquent que les Français restent sensibles à la cause de la faim dans le monde et semblent peu convaincus du rôle des multinationales pour enrayer ce fléau.

En effet, 80% des Français pensent que les activités des multinationales de l’agroalimentaire dans les pays du Sud ne bénéficient pas aux populations locales. Et 65% des personnes interrogées considèrent que l’Etat français devrait réglementer et contrôler l’accès des multinationales françaises aux ressources des pays du Sud. 81% des personnes interrogées pensent qu’il faut développer en priorité une agriculture de petits exploitants (face au développement d’une agriculture industrielle : 16%) pour nourrir le mieux possible l’humanité d’ici 2013. 55% des Français placent majoritairement leur confiance dans les acteurs de la société civile (ong, syndicats paysans…) pour lutter contre la faim dans le monde, devant les instances internationales (pourtant en hausse de 2 points par rapport à 2012, à 22%). Parmi les principales causes de la faim, 46% des Français (contre 39% en 2012) soulignent l’importance de la « corruption des gouvernants et des décideurs économiques », 32% d’entre eux pointent la spéculation sur les produits agricoles et 28% l’achat ou la location de terres agricoles des pays pauvres par des entreprises privées.

Principaux enseignements

Faim dans le monde : les Français hésitent entre dégradation et absence de réelle évolution Contrairement à la précédente vague d’enquête de notre sondage pour CCFD-Terre solidaire réalisée en 2012, les Français sont aujourd’hui plus nombreux à percevoir une stabilisation de la situation de la faim dans le monde qu’une dégradation. Un sur deux (50%) pensent en effet que cette situation « n’évolue pas vraiment » ces dernières années, alors que 43% estiment qu’elle « se dégrade ». Seuls 6% déclarent quant à eux qu’elle « s’améliore ». Cette question ayant été posée à plusieurs reprises aux Français depuis 2007, c’est la première fois que ceux-ci perçoivent plus une stabilisation qu’une dégradation ; le retournement est même assez net par rapport à 2012 puisque la stabilisation perçue progresse de 11 points tandis que la dégradation perçue recule de 13 points. Il n’est pas impossible que la moindre médiatisation récente des problèmes humanitaires dans les pays du Sud, notamment en raison de la focalisation grandissante sur les problèmes économiques de notre pays, ait contribué à cette évolution. Le peu d’optimisme des Français pour l’avenir de leur pays peut dans cette optique être un facteur de moindre prise en compte des problèmes extérieurs, et en particulier de ceux des pays du Sud. Il n’en reste pas moins que la perception générale de la situation de la faim dans le monde reste largement mauvaise, la part de Français voyant une dégradation excédant très nettement celle des Français voyant une amélioration (37 points de différence). La société civile premier acteur à même de combattre la faim dans le monde La perception des acteurs capables d’agir dans ce domaine reste quant à elle stable : comme en 2012, c’est à la société civile que les Français font le plus confiance pour « lutter contre la pauvreté et la faim dans le monde », avec 55% des citations (+1). Le deuxième acteur cité, les instances internationales, ne recueille lui que 20% des réponses (+2) tandis que les gouvernements des pays riches (6%), des pays du Sud (4%) ou les entreprises multinationales (1%) sont mentionnés de façon encore moins fréquente. Il est par ailleurs à noter que les sympathisants écologistes ont particulièrement confiance dans la société civile (70%) et dans les instances internationales (28%) pour mener cette lutte. La corruption des gouvernants et des décideurs économiques, première cause de ce phénomène, les raisons perçues étant de plus en plus humaines et non climatiques Alors que plusieurs raisons émergeaient en 2012 pour expliquer la situation de la faim dans le monde, l’importance de « la corruption des gouvernants et des décideurs économiques » est cette année clairement en tête dans l’esprit des Français. Cette dimension arrive ainsi en première position avec 46% des citations et progresse de 5 points tandis que les dimensions qui la talonnaient en 2012 reculent légèrement (32% et -2 points pour la spéculation sur les produits agricoles) ou plus nettement (23% et -12 points pour les conditions naturelles défavorables). C’est d’ailleurs cette année le fait que les pays riches subventionnent des agricultures destinées à l’exportation qui arrive en deuxième position avec 33% des citations et une progression de 8 points, l’achat ou la location de terres agricoles par des entreprises privées progressant également de 6 points (28%). Les Français considèrent donc de plus en plus que la faim dans le monde est avant tout due à des facteurs humains plus que la conséquence de facteurs climatiques peu maitrisables, mettant autant au cause les gouvernants des pays du Sud que leurs homologues et décideurs économiques des pays du Nord. A noter que les jeunes et les sympathisants écologistes sont particulièrement réceptifs aux arguments mettant en cause les subventions agricoles des pays riches ou l’achat/location de terres par des entreprises privées tandis que la corruption des gouvernements est encore plus souvent mise en cause par les Français les plus diplômés. L’activité des multinationales dans les pays du Sud: une situation problématique à réglementer selon les Français Autre signe de cette prise de conscience, une très large majorité de Français sont aujourd’hui convaincus du rôle nocif joué par les multinationales de l’agroalimentaire dans les pays du Sud. 80% estiment en effet que leurs activités dans ces pays « ne bénéficient pas aux populations locales », seuls 16% pensant le contraire. Au-delà de ce simple constat, une grande partie des Français se disent aujourd’hui favorable sur le principe à ce que l’Etat français intervienne pour résoudre ce problème. Deux tiers d’entre eux pensent ainsi qu’il devrait « réglementer et contrôler l’accès des multinationales françaises aux ressources des pays du Sud », près d’un tiers (29%) le pensant même « tout à fait ». 29% des Français se disent quant à eux opposés à cette idée. Il est intéressant d’observer que cette approbation majoritaire est peu corrélée à la proximité politique des répondants, les sympathisants de gauche étant à peine plus favorables que ceux de droite (69% au lieu de 63%), signe que la nécessité d’agir est perçue de façon homogène au sein de la société française. Les Français nettement en faveur d’une agriculture de petits exploitants La priorité à apporter à une agriculture de petits exploitants plutôt qu’une agriculture industrielle est assez nette parmi les Français : 81% pensent qu’il faut développer en priorité la première « pour nourrir le mieux possible l’humanité d’ici 2030 » tandis que seuls 16% ont une préférence pour la seconde. Les sympathisants écologistes sont encore plus convaincus de l’importance de privilégier une agriculture de petits exploitants, 91% étant de cet avis. Une majorité de Français croient à la possibilité de changer les choses par ses pratiques de consommation Malgré un recul par rapport à la précédente enquête, la majorité des Français estiment toujours possible de « contribuer à lutter contre la faim dans le monde par les pratiques et habitudes de consommation des habitants des pays développés ». C’est en effet le cas de près 59% d’entre eux, contre 71% l’année dernière, 40% estimant à l’inverse que cela n’est pas possible. Ce recul est probablement en partie dû au coût anticipé de ces changements dans un contexte économique difficile, incitant une grande partie des Français à voir d’un mauvais oeil toute évolution pouvant potentiellement amputer leur pouvoir d’achat. Dans le détail, on remarque toutefois que la part de Français croyant « tout à fait » à cette possibilité reste importante (35%, contre 44% l’année dernière) et que ce sont les jeunes qui adhèrent le plus à cette idée : 68% des 25-34 ans croient à ce principe, ainsi que 66% des 18-24 ans. Il est quelque part encourageant que les jeunes générations soient les plus convaincues par cette possibilité de changer les choses, étant en première ligne des comportements de demain. La parole de l’Eglise attendue sur la faim dans le monde Une attente existe aujourd’hui au sein de la société française sur la prise de parole de l’Eglise sur la pauvreté et la faim dans le monde, comme en atteste le fait que près de 6 Français sur 10 (58%) considèrent que l’Eglise catholique ne s’exprime aujourd’hui « pas assez » sur ces sujets. Parmi les Français pensant qu’elle le fait assez, une majorité estime par ailleurs qu’elle le fait « comme il faut » (25%) plutôt que « trop » (8%). Il est d’ailleurs à noter que cette perception est peu corrélée à la confession des répondants, les différentes catégories de croyants et les non-croyants s’accordant sur ce constat, même si les catholiques sont à la fois les plus nombreux à attendre une parole plus importante (61%) ou à penser que cette parole est suffisante (29%). Quant au rôle plus général des organisations catholiques dans la lutte contre la pauvreté et la faim dans le monde, les Français se montrent aujourd’hui très partagés sur la question puisqu’une moitié (47%) estime que ce rôle est important quand une autre moitié (48%) pense le contraire. Cette perception est cette fois plus corrélée à la confession des répondants puisque le rôle positif de ces organisations est plus souvent cité chez les catholiques (52% contre 45%) ou les protestants (57% contre 43%), mais surtout chez les catholiques pratiquants réguliers (73% contre 25%). Sondage de l’Institut CSA pour CCFD-Terre solidaire

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