Transparence fiscale : la proposition inutile du Sénat

Publié le 08.07.2016| Mis à jour le 08.12.2021

Dans le cadre de la loi Sapin 2, les sénateurs ont amendé hier l’article 45 bis sur le reporting pays par pays public. Si la proposition de l’Assemblée nationale, adoptée le 9 juin par les député-e-s était déjà très insatisfaisante, le Sénat a fini de la vider de sa substance.


Tout d’abord parce qu’il s’agit d’un reporting a minima calqué sur la proposition de directive de la Commission européenne d’avril 2016, dont le périmètre d’application est véritablement problématique : en effet, les entreprises multinationales ne seront tenues de rendre publiques des informations que dans les pays de l’Union européenne et dans les paradis fiscaux qui figureront sur une liste (qui reste encore à définir) de la Commission européenne. Ensuite parce que les sénateurs ont ajouté que cette mesure n’entrerait en vigueur qu’au moment où la directive européenne serait adoptée, ce qui rend leur décision parfaitement inutile.

Pour le CCFD-Terre Solidaire, Oxfam, ONE et Peuples Solidaires-ActionAid France, « Passons sur le fait qu’il est complètement inutile d’affirmer dans une loi que la France appliquera une mesure si l’Union européenne l’adopte : dans ce cas, il s’agit d’une obligation légale ! Mais il faut aussi rappeler que ce simulacre de transparence n’est pas la solution attendue pour lutter réellement contre l’évasion fiscale : seule une photographie complète des activités et impôts payés par les entreprises dans tous les territoires où elles sont implantées permettra de repérer d’éventuels transferts de bénéfices et de savoir si elles paient leur juste part d’impôts. Avec cette proposition de reporting à trous, il restera encore de trop nombreuses zones d’ombre qui seront exploitées par les entreprises qui pratiquent l’évasion fiscale !D’autre part, la liste des paradis fiscaux promise par l’Union européenne ne pourra être exhaustive : il y a fort à parier que le Delaware aux Etats-Unis ou la Suisse n’y figureront pas pour des raisons politiques, et les entreprises pourront donc toujours cacher leurs bénéfices dans ces territoires ».

Cette proposition exclut également les pays en développement qui perdent chaque année au moins 180 milliards de dollars à cause des pratiques d’évasion fiscale des multinationales. En effet, à moins de figurer dans la liste des paradis fiscaux de l’Union européenne, ces pays n’auront pas accès aux informations concernant les activités et les impôts payés par les multinationales chez eux.

Lors de l’examen de cet amendement en deuxième lecture, le CCFD-Terre Solidaire, ONE, Oxfam et Peuples solidaires-ActionAid France, appellent les député-e-s, à rejeter la proposition du Sénat et à aller plus loin que leur vote en première lecture pour adopter un reporting public complet, couvrant l’ensemble des pays dans lesquels les multinationales sont présentes, sans exception.

Contacts presse :
CCFD-Terre Solidaire : Karine Appy, 06 66 12 33 02, k.appy@ccfd-terresolidaire.org
ONE : Annabel Hervieu : 06 31 22 89 68, annabel.hervieu@one.org
Oxfam France : Caroline Prak, 06 31 25 94 74, cprak@oxfamfrance.org
Peuples Solidaires-ActionAid France : Katia Roux, 06 72 32 18 24, k.roux@peuples-solidaires.org

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