Tunisie : Un observatoire économique et social indépendant

Publié le 10.10.2013| Mis à jour le 08.12.2021

Engagée dans la définition d’un modèle économique différent pour relancer l’économie tunisienne, la société civile a décidé de se lancer dans la création d’un Observatoire économique et social indépendant. Une première étape vers le développement de projets locaux durables.


Né en mai 2011, le Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux (FTDES), entre aujourd’hui dans une deuxième phase de sa courte histoire. Après avoir pleinement participé à la chute du régime de Ben Ali (voir hors-texte), l’association, partenaire du CCFD-Terre Solidaire, investit le champ économique et social. Dans un pays miné par la récession, seul un changement de conjoncture économique permettra la poursuite du processus démocratique. Créer des emplois est devenu une priorité pour éviter qu’au chaos politique ne s’ajoutent les risques de récupération de la colère de la population par les extrémistes de tout poil.

Conscient du défi, le FTDES a décidé de procéder par étapes. D’abord dresser un état des lieux pour mesurer les conséquences de la détérioration économique. « Les statistiques fournies par le gouvernement ne sont pas fi ables. Elles ne sont pas assez fines pour voir ce qui se passe au niveau des régions et des bassins d’emploi dans un pays où il y a de fortes disparités », explique Alaa Talbi, directeur de projet au sein du FTDES. Quoi de commun, en effet, entre la situation à Tunis, le poumon économique et politique du pays, à Gafsa, tournée exclusivement vers l’exploitation des mines de phosphate, à Monastir, au développement exponentiel et anarchique dû à l’exode rural ou à Zarzis, qui accueille des réfugiés en provenance de Libye depuis la chute du régime de Kadhafi ?

S’appuyant sur des associations présentes sur tout le territoire, le FTDES collecte des informations sur le nombre de chômeurs, les salariés précaires, le secteur informel, les femmes ou encore les mouvements sociaux. Ces données seront mises à la disposition de l’ensemble de la société civile et permettront de créer des passerelles entre les réseaux qui ne communiquent pas suffisamment entre eux ou n’échangent pas encore sur leurs bonnes pratiques.

Cette collecte n’est qu’une première étape. « À partir de ces données, nous souhaitons effectuer des études afi n de déterminer les pistes à explorer pour préparer l’avenir : quels sont les besoins de la population ? Les potentiels de chaque région ? En sachant que ce travail n’est pas fait par les autorités tunisiennes. Dans ce pays, conclut Alaa Talbi, tout est à reconstruire. »

Alors que les institutions internationales pressent la Tunisie de s’ouvrir davantage aux investisseurs étrangers et de poursuivre la politique libérale à l’œuvre depuis plus de vingt ans, pour le tissu associatif, au contraire, il est temps de changer le fusil d’épaule. Un des grands axes de réflexion tourne autour de l’économie sociale et solidaire avec en ligne de mire la structuration des activités du secteur informel.

La société civile est bien consciente des obstacles à lever pour faire entendre sa voix. « La population est méfiante. Il y a eu trop d’espoirs déçus. Nous travaillons avec des partenaires internationaux qui, du Brésil à l’Italie, ont réussi à créer des modèles alternatifs », conclut Alaa Talbi. Les questions débattues lors du FSM (Forum social mondial) devraient d’ailleurs apporter de l’eau au moulin de l’association, bien décidée à mobiliser de nouveaux acteurs, comme les institutions de microcrédits afin de les inciter à davantage fl écher l’octroi de prêts vers de nouvelles activités : du tourisme solidaire à l’agriculture durable en passant par l’exploration des énergies renouvelables…

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