Les fermes agro-écologiques d’ActSol en Casamance attirent les jeunes

Publié le 23.09.2014| Mis à jour le 08.12.2021

Pour redonner ses lettres de noblesse à l’agriculture et lutter contre l’exode rural, Oumar Ba a créé il y a trois ans des fermes agro-écologiques. Ces nouveaux modèles agricoles attirent de plus en plus de jeunes.


Daouda Sané est un jeune père de famille heureux. Fraîchement diplômé de la ferme agro-écologique de Tobor, initiée par ActSol – Action solidaire pour le développement -, est une association soutenue par le CCFD-Terre Solidaire. Daouda va pouvoir apporter quelque chose de nouveau à l’exploitation familiale. « J’ai toujours cultivé avec mon père, raconte-t-il. Sur nos trois hectares, nous faisons le niebe (sorte de haricot), l’arachide, le mil, le maïs, autant de cultures d’hivernage traditionnelles. Sans compter la rizière. Je vais me lancer dans le maraîchage, comme je l’ai appris à la ferme. Nous utilisions, jusqu’à présent, les pesticides. Depuis ma formation, j’ai laissé tomber tout produit chimique. Je protège désormais nos cultures avec des feuilles de neem ou de caïlcedrat qu’on trouve partout. Leur amertume repousse naturellement les insectes. C’est formidable de pouvoir cultiver de manière saine tout en ayant une meilleure rentabilité. Je le sais, car je l’ai expérimenté sur ma parcelle à la ferme. »

Cultiver de manière saine et durable tout en développant le potentiel économique, voici les principaux enjeux de la formation d’une année proposée par les 4 fermes-écoles agro-écologiques d’ActSol, dirigées par Oumar Ba, dont deux se trouvent en Casamance. A l’origine, une prise de conscience et une réflexion sur la sécurité alimentaire. Oumar est choqué par les émeutes de la faim de 2007-2008. « Il n’était pas normal, pour un pays qui avait été exportateur, de vivre de tels moments. Gosse, j’ai connu la sécurité alimentaire et le plaisir qu’on en tirait. » En 40 ans, cet homme toujours en action a vu les choses se détériorer. La grande sécheresse de 1973, les plans d’ajustements structurels des années 1980, le désengagement de l’Etat, les pratiques agricoles avec usage intensifs de produits chimiques qui ont intoxiqué et épuisé les sols, ont eu pour résultat de sur-endetter les paysans et de leur faire oublier les gestes traditionnels qui se rapprochaient, de façon empirique, de l’agro-écologie.

« L’agriculture, ça ne marche pas », entend-on partout. Oumar Ba veut prouver qu’une pratique comme l’agro-écologie peut ramener la sécurité alimentaire grâce à une grande diversité de cultures et peut permettre de faire des profits, en évitant aux paysans de dépendre de l’agriculture productiviste et de s’endetter. Tout ça le pousse à ouvrir en 2011, ses fermes écoles agro-écologiques destinées aux jeunes à partir de 23 ans, « parce qu’ils sont plus ouverts au changement ». Les apprentissages allient théorie et pratique et abordent les domaines de la production végétale et animale, la pisciculture, l’aviculture, l’apiculture et l’agro-foresterie.

Mais pour convaincre et motiver les jeunes, Oumar aborde le sujet sous l’angle de la «rentabilité». « Si on a le ventre vide, on se moque pas mal de l’environnement. Mais en prouvant qu’on va gagner plus, en préservant en outre l’environnement, ça va les intéresser. » Grâce au bouche à oreille, ses fermes attirent de plus en plus de jeunes. A Tobor, en Casamance, les places sont limitées à dix. C’est peu, c’est un début. La ferme ne dispose que de trois hectares. Pour le moment.

Si la majorité des jeunes sont des fils d’agriculteurs, Sire Diatta, de père douanier, ne s’était jamais projetée dans ce métier. C’est sa soeur qui la pousse. Au terme de sa formation, elle est acquise 100% à la terre ! « J’ai expérimenté qu’il était possible de réussir et d’avoir une bonne rentabilité, en respectant certaines règles et avec des méthodes naturelles. Je suis fière de savoir que je pourrai être autonome et transmettre un savoir-faire. On apprend à travailler sans tendre la main. » Sidya Djiba et Mamadou Lamine Goudiaby ajoutent : « On sait qu’on pourra travailler en famille, alors on s’accroche. La terre ne ment pas, elle donne tout. Avec moins d’un hectare, on peut vivre avec un bon maraîchage et un petit cheptel. On travaille pour soi, et on va former une coopérative avec les jeunes de la promotion pour gérer l’écoulement de nos produits. C’est un beau projet. »

L’autonomie, la réflexion, l’observation, l’expérimentation, le sens de l’initiative : de quoi rendre à l’agriculture ses lettres de noblesse. Ce que vise encore ActSol, c’est d’agir sur la transformation sociale et culturelle de la famille pour parvenir à cela. « Notre culture est encore très centrée sur la cohésion familiale, fait remarquer Oumar BA. C’est au sein de la cellule familiale que tout se décide. On a nos rites pour protéger nos terres et nous protéger. On ne va pas créer d’emplois directs, on va inverser les tendances. Ce sont eux qui vont créer leur propres revenus. » Et d’ajouter, aux côtés d’autres acteurs convaincus de ce modèle agricole familial : « Nous partons des hommes et de la main de l’homme. Il faut réapprendre les gestes des Anciens en y apportant le savoir du chercheur. En partant du savoir-faire traditionnel, nous rétablissons le lien avec l’écologie. On apporte une réponse sociale avec un produit et ça produit de l’économique. »

Elisabeth du Closel

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