Lettre publique aux autorités françaises sur la situation au Tchad
Ndjamena – Paris, le 20 mai 2009
La rébellion tchadienne a repris une nouvelle fois son offensive contre le régime tchadien. Ce cycle de violence politique qui a démarré en 2005 après la modification constitutionnelle permettant au président Idriss Déby Itno de pouvoir briguer indéfiniment la présidence, résulte de l’incapacité des dirigeants tchadiens d’imaginer et de mettre en oeuvre un processus de sortie de crise globale pour sortir le Tchad de ses vieux démons.
Une fois encore, le régime s’enferme dans une logique guerrière qui consomme la plus grande partie des revenus de l’Etat, renforce la corruption et nuit gravement à l’Etat de droit et aux droits de l’Homme. Les rebelles, sans espace politique ouvert de négociations, restent dans une logique de confrontation et profitent du soutien soudanais, dans une logique de guerre croisée par rébellion interposée.
Malgré l’intense effort de propagande gouvernementale qui veut faire croire à une victoire décisive de l’armée nationale, des milliers de rebelles bien armés sont toujours présents dans l’est du Tchad et au Darfour et cette situation entraîne toujours un risque majeur pour le Tchad et la sous-région.
La situation politique est bloquée au Tchad. Son gouvernement a tout fait pour que les accords politiques d’août 2007 sur l’organisation des élections soient inopérants malgré les efforts del’opposition démocratique. La disparition, en 2008, de son principal porte-parole, M. Ibni Oumar Mahamat Saleh, ourdie par les plus hautes autorités au pouvoir n’a jamais été élucidée. Les accords signés à Syrte (Libye), en 2007, entre le gouvernement et les rebelles, n’ont débouché sur aucun engagement politique.
Tous les observateurs de la vie politique au Tchad savent que le régime refuse toute véritable ouverture démocratique.
Les associations françaises ont alerté depuis des années, les autorités françaises sur la responsabilité du régime tchadien dans la détérioration régulière de la situation politique. L’an dernier, après les événements de février, elles ont pu présenter au plus haut niveau, les conditions politiques préalables à un retour à une paix durable.
Pourtant, encore une fois, l’action de la France n’a pas été dans le sens de la démocratie et de la paix : aucune réaction quant aux accusations contre le régime sur la mort du principal leader politique de l’opposition, blocage des accords politiques, intense activité diplomatique sans résultat sur le Soudan…. Sans réelle contrepartie politique, l’appareil diplomatique et militaire français continue aujourd’hui à soutenir le régime d’Idriss Déby Itno.
Les associations françaises et tchadiennes demandent aux autorités françaises de prendre leurs responsabilités au Tchad pour imposer un cessez-le-feu et garantir un véritable processus global de sortie de crise basé sur un dialogue inclusif qui renforcerait les efforts réalisés dans le processus politique du 13 août.
Ces associations demandent à la France de faire pression sur le Président Deby pour que celui-ci accepte un processus transparent de négociations.
Concernant la disparition de M. Saleh, malgré les promesses répétées de la France qu’elle mettrait tout en oeuvre pour connaître la vérité, rien n’a été obtenu des autorités tchadiennes.
Les associations françaises et tchadiennes demandent aux autorités françaises ce qu’elles comptent concrètement faire pour que les auteurs de la disparition de M. Saleh soient identifiés, recherchés, arrêtés et condamnés.
Associations signataires :
- Action des chrétiens pour l’abolition de la torture (ACAT-France)
– Comité catholique contre la faim et pour le développement (CCFD-Terre solidaire)
– Comité de suivi de l’appel à la paix et à la réconciliation nationale au Tchad (CSAPR)
– Survie
Lettre publique aux autorités françaises sur la situation au Tchad (fichier PDF, 103 ko)
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