Afrique des Grands Lacs : renforcer les droits des paysans et l’accès à la terre
Dans la région des Grands Lacs la question de l’accès à la terre est centrale. Nous y accompagnons des organisations de la société civile pour aider à la résolution des conflits liés au foncier.
Nous appuyons aussi leurs actions de plaidoyer auprès des Etats en faveur de réformes foncières et agricoles ambitieuses.
En République démocratique du Congo, au Rwanda, au Burundi, où les densités de population sont extrêmement fortes, les terres sont morcelées (bien souvent moins de 0,5 hectare) et fragilisées par l’érosion, alors que plus de 80 % des citoyens vivent de la terre. Le manque de terre et la concurrence pour y accéder, la rivalité des usages (agriculture pastoralisme, extractivisme, exploitation forestière, pression urbaine, etc.) font de l’accès et de la gestion de la terre un sujet brûlant. Tout comme l’absence ou l’inadaptation des lois foncières et la remise en cause des cadres légaux ou coutumiers qui plongent dans l’insécurité des communautés qui voient leurs droits et coutumes remis en cause.
Pour répondre à ces défis de transformation économique et sociale de nombreux acteurs (chercheurs, organisations d’appui technique et paysannes, pouvoirs publics) interviennent à la croisée d’enjeux multidimensionnels : construction de la paix, promotion d’une gouvernance participative et appui aux agricultures familiales. C’est le cas du CCFD-Terre Solidaire présent dans la région depuis 1996.
Face au désengagement des États et à leur faiblesse en matière de gouvernance foncière, en République démocratique du Congo et au Burundi, le régime de la propriété privée s’est généralisé, les formes coutumières de gestion foncière se sont effritées. On observe aussi une marchandisation progressive de toutes les filières d’accès au sol et un morcellement des petites propriétés familiales.
Dialogue intercommunautaire
Ces processus engendrent de nombreux conflits qui peuvent dégénérer en affrontements violents. Après les avoir identifiés, nos partenaires proposent des modalités de résolutions basées sur le dialogue intercommunautaire et sur la reconnaissance des droits et des devoirs de chacun. Une attention particulière est portée à l’accès des femmes à la terre, celles-ci effectuant 70 % du travail agricole. Ce qui implique de faire évoluer les cadres coutumiers et de dialoguer avec les grands propriétaires terriens.
Si la situation politique des trois pays varie, le suivi de réformes foncières adaptées et accessibles, qui prennent en compte les droits des paysans, s’avère essentiel.
L’exemple du Rwanda
Au Rwanda, l’État a fait de la réforme foncière un outil privilégié pour promouvoir un type de développement censé accroître la sécurité foncière et permettre une hausse de l’investissement et de la productivité agricole. Cette réforme favorise en fait la spécialisation des cultures par région et la concentration des terres et des moyens de production entre les mains des plus gros exploitants et des investisseurs.
Enfin, avec ses alliés et partenaires comme le réseau EURAC [[Créé en 2003, le Réseau européen pour l’Afrique centrale (Eurac) rassemble des organisations européennes de la société civile. Il mène un plaidoyer auprès de l’Union européenne afin qu’elle s’engage à aider la région des Grands Lacs à se construire un avenir meilleur.]], le CCFD-Terre Solidaire échange avec les pouvoirs publics, à Bruxelles. Son objectif : que les politiques de coopération et de développement et les investissements des acteurs économiques en Afrique n’entraînent pas d’impact foncier négatif, comme les accaparements de terres.
Déplacées par les conflits, ignorées par les pouvoirs publics, les paysannes du Nord-Kivu manquent cruellement de terre, pour nourrir leur famille et développer des activités économiques. Mais aussi pour s’émanciper de la tutelle de leurs frères, leur mari, et de celle des autorités coutumières. Partant de ce constat, notre partenaire Uwaki, organisation féminine paysanne du Nord-Kivu, a mis en place des contrats de sécurisation foncière dans des territoires touchés par l’insécurité (Masisi, Nyiragongo, Rutshuru et Walikale). Ces contrats sont le résultat d’un véritable dialogue entre chefs coutumiers, grands propriétaires terriens et paysannes. L’ensemble des parties s’accorde sur la superficie allouée aux femmes, le type de cultures pratiquées, la durée et le paiement du bail. Au terme d’un long travail de persuasion, de nouveaux contrats économiques se nouent prenant en compte les droits et les devoirs de chacun. Ce processus s’avère aussi un levier pour le changement des pratiques coutumières. Depuis 2018, 4 000femmes ont ainsi pratiqué l’agroécologie dans des champs collectifs et individuels, jusque-là dédiés à l’élevage extensif ou laissés en jachère. Ces initiatives ont aussi donné lieu à des actions de plaidoyer auprès des députés provinciaux afin qu’ils puissent s’inspirer de ces pratiques dans le cadre de la réforme foncière.
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