Devoir de vigilance : verdict le 21 février

Publié le 20.02.2017| Mis à jour le 07.12.2021

Le devoir de vigilance des entreprises sera-t-il définitivement adopté à l’Assemblée nationale le 21 février 2017, malgré les blocages du Sénat ? Son objectif : lever l’impunité des multinationales et éviter de nouveaux drames tels celui du Rana Plaza.

Le devoir de vigilance, de quoi s’agit-il ?

« Ce texte impose à nos grandes entreprises la publication et la mise en œuvre d’un plan de vigilance afin de prévenir les violations des droits humains et les dommages environnementaux sur l’ensemble de leurs chaînes de production, et d’éviter de nouveaux Rana Plaza », explique Dominique Potier, député PS, rapporteur de la proposition de loi.

En d’autres termes, ce texte s’attaque enfin à l’impunité des multinationales qui se déchargent de leurs responsabilités sur les différents maillons de la chaîne industrielle (fournisseurs, transporteurs, sous-traitants…).

Un texte édulcoré

La société civile, fortement mobilisée depuis de nombreuses années pour faire reconnaître et appliquer le devoir de vigilance, reconnaît les avancées du projet, tout en regrettant ses limites. Les organisations membres du Forum citoyen pour la RSE, coordonné par le CCFD-Terre Solidaire, considèrent en effet ce texte comme «un premier pas indéniable» .

« Il permet enfin d’adapter le droit à la réalité de la mondialisation des activités économiques des multinationales qui peut se traduire par des atteintes graves aux droits humains », souligne Nayla Ajaltouni, coordinatrice du Collectif Éthique sur l’étiquette.

Concrètement, cette nouvelle obligation exige des entreprises un plan de vigilance en plusieurs points , notamment : une cartographie des risques ; des procédures d’évaluation des filiales, sous-traitants et fournisseurs ; un dispositif de suivi et d’évaluation des mesures de prévention validées et mises en œuvre.
Deuxièmement, toutes les parties prenantes (organisations syndicales, associations…) pourront être associées à l’élaboration du plan de vigilance. Enfin, en cas de dommages liés à un défaut de plan de vigilance ou de sa mise en œuvre, l’entreprise sera sanctionnée par une amende plafonnée à 30 millions d’euros.

Reste que la pression exercée par les organisations patronales a réduit la portée du texte. En effet, ne sont concernées que les entreprises de plus de 5 000 salariés, alors que le seuil proposé au départ était de 500 salariés. Résultat, seules 150 à 200 entreprises sont visées.

D’autre part, il n’y aura pas, comme initialement prévu, de sanction pénale à l’égard des dirigeants d’entreprise ayant contrevenu à leurs obligations de vigilance. Enfin, le recours à la justice en cas de dommages sera très complexe car la charge de la preuve revient aux victimes.

« S’il y a des atteintes aux droits, nous pourrons saisir la justice. Mais l’objectif de cette loi n’est pas de lancer des campagnes punitives contre les multinationales. Il est de les contraindre à ne plus privilégier les bénéfices aux dépens des droits fondamentaux des populations et de l’environnement », insiste Nayla Ajaltouni.

À l’orée du XIXe siècle, l’abbé Henri Grégoire, fervent partisan de l’abolition de l’esclavage défendait déjà le principe de chaîne de responsabilités :

« J’appelle négrier, non seulement le capitaine de navire qui vole, achète, enchaîne, encaque et vend des hommes noirs, ou sang mêlés, qui même les jette à la mer (…), mais encore tout individu qui, par une coopération directe ou indirecte, est complice de ces crimes. »

Ainsi, selon lui, la dénomination de négriers comprend notamment : « les armateurs, affréteurs, actionnaires, commanditaires, assureurs (…) et jusqu’au dernier des matelots, participant à ce trafic honteux » [[Abbé Henri Grégoire, Des peines infamantes à infliger aux négriers, Paris, Baudouin Frères, Imprimeurs, 1822, extraits www.culture.fr/ lesabolitions – © 2014, cité par Dominique Potier à l’Assemblée nationale le 29 novembre 2016.]]. Il aura fallu près de 200 ans pour que ce principe commence à être reconnu au niveau juridique français. La société civile espère un vote définitif du texte qui permettra d’essaimer aux niveaux européen et international.

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