« Il est temps que la France cesse d’encourager les projets climaticides de TotalEnergies en Afrique »
A l’occasion du sommet Afrique-France qui s’ouvre le 8 octobre à Montpellier, des philosophes, des économistes, des responsables d’institutions et d’ONG, dont la présidente du CCFD-Terre solidaire Sylvie Bukhari-de Pontual et le député européen Pierre Larrouturou dénoncent le soutien de la France aux projets du géant pétrolier en Ouganda et au Mozambique.
Tribune. Alors que s’ouvre à Montpellier le sommet Afrique-France, et que l’urgence de réduire drastiquement l’extraction des énergies fossiles se fait chaque jour plus pressante, il est temps que la France cesse d’encourager les projets climaticides que TotalEnergies veut lancer en Afrique.
Le président de la République Emmanuel Macron annonçait sur Twitter à propos de la dernière évaluation des Nations unies : « +2,7 °C à l’horizon de 2100. Ce scénario est dramatique. » Il n’y a pas de fatalité, ce scénario dépend avant tout des décisions qui seront prises dans les semaines et les mois à venir. Or, la France s’apprête à entériner de nouvelles extractions fossiles qui, elles, vont s’avérer réellement dramatiques.
En effet, en Ouganda et au Mozambique, TotalEnergies est en passe de faire exploser deux « bombes climatiques » avec le soutien actif de nos institutions et de notre appareil diplomatique.
Quatre cents puits de pétrole
En Ouganda, ce sont quatre cents puits de pétrole et un oléoduc de 1 443 km de long que TotalEnergies souhaite construire jusqu’à la côte tanzanienne, afin d’exploiter des réserves pétrolières (générant 34 millions de tonnes de CO2) au sein d’un parc naturel protégé et sur les rives du lac Albert, à la source du Nil. Au Mozambique, la mise en exploitation des 9es plus grandes réserves gazières du monde émettra autant que sept années d’émissions de gaz à effet de serre de la France.
Alors que l’Agence internationale de l’énergie nous enjoint désormais de cesser tout nouveau projet d’extraction d’énergie fossile pour espérer maintenir le réchauffement sous la barre des 1,5 °C décidée par l’accord de Paris, l’envergure de ces nouveaux projets dépasse l’entendement : plus de 11 milliards de dollars (environ 9,53 milliards d’euros) d’investissement en Ouganda et en Tanzanie, 24 milliards de dollars au Mozambique.
Malgré ses déclarations vertueuses, l’Elysée a envoyé, en mai, une lettre au président ougandais pour lui affirmer son soutien au projet pétrolier de TotalEnergies, alors même qu’un recours en justice avait été déposé par six ONG françaises et ougandaises au titre de la loi sur le devoir de vigilance en raison des multiples violations des droits humains et des dommages environnementaux qu’implique ce projet.
Selon un rapport de l’ONG les Amis de la Terre, le gouvernement français a également accentué ses efforts diplomatiques et économiques au Mozambique pour y défendre les intérêts de TotalEnergies (visites diplomatiques, financements publics, missions d’affaires, coopération militaire…), engageant de facto la France, et l’ensemble de nos concitoyens, dans cette aventure climaticide.
A quelques semaines de la COP26 à Glasgow, le gouvernement français et notre diplomatie s’emploient donc à saboter notre avenir à tous.
La France ne pourra pas lutter contre le dérèglement climatique si son président, tel Janus, offre deux visages opposés : héraut du climat sur la scène internationale et façonnier du « business as usual » sur le terrain.
Dans son encyclique Laudato Si’, le Pape François a des mots très fermes contre l’attentisme des Etats qui ne font que retarder la catastrophe : « Il ne suffit pas de concilier, en un juste milieu, la protection de la nature et le profit financier […]. Sur ces questions, les justes milieux retardent seulement un peu l’effondrement ». (LS 194) Nous devons rechercher des alternatives aux énergies fossiles, aujourd’hui et non dans le futur. Et les mettre en œuvre maintenant. Sans attendre. En levant tout soutien public aux projets climaticides.
Emmanuel Macron a affirmé que le Sommet Afrique-France permettra de « refonder les relations entre la France et l’Afrique ». Nous appelons la France à s’engager auprès des sociétés africaines pour les soutenir dans la voie de la transition écologique. Ne ratons pas ce rendez-vous !
Signataires :
Guy Aurenche, avocat honoraire, défenseur des droits humains
Monique Baujard, présidente des Amis de La Vie
Dominique Bourg, philosophe, professeur des universités honoraire, directeur de la revue La Pensée Ecologique
Sylvie Bukhari-de Pontual, présidente, CCFD-Terre Solidaire
William Clapier, auteur et théologien
François Euvé, rédacteur en chef d’Etudes
Elisabeth Flichy Saint-Bonnet, Chrétiens Unis pour la Terre
Benoit Halgand, étudiant mobilisé contre le projet TotalEnergies à polytechnique, engagé chez Pour un réveil écologique
Pierre Larrouturou, député européen
Elena Lasida, économiste
Laura Morosini, Mouvement Laudato Si’
Marcel Rémond, jésuite, directeur du Ceras
Michel Roy, secrétaire général de Justice et Paix…
Lire aussi :
Notre article Stoppons l’impunité de l’industrie du gaz : l’appel à l’aide des habitants de Cabo Delgado au Mozambique
Les Amis de la Terre et Survie : Total en Ouganda et Tanzanie (dont un rapport de 33 pages)
Les Amis de la Terre France, Mozambique et International
Mozambique : de l’eldorado gazier au chaos (dont un rapport de 39 pages)
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