L’expertise reconnue de Kambale Malembe

Publié le 05.11.2012| Mis à jour le 08.12.2021

Partenaire du CCFD-Terre Solidaire depuis son engagement dans la région des Grands Lacs suite au génocide rwandais de 1994, Kambale Malembe, originaire du Nord-Kivu, en République démocratique du Congo (RDC), récolte les fruits de son travail sur les questions foncières. Le Forum des amis de la terre (Fat), qu’il a créé, fait désormais autorité à l’échelle nationale.


Malembe siège depuis le 26 avril aux côtés de représentants des ministères et de juristes, au sein de la commission nationale chargée de rédiger les mesures d’application du nouveau code agricole, promulgué en décembre 2011. Il préside même la sous-commission chargée des questions foncières. Une responsabilité qui prolonge le plaidoyer mené par le Fat depuis 2007, pendant l’élaboration de la loi. Durant cette période, l’association a sensibilisé les décideurs politiques et administratifs congolais à la nécessité d’inclure les organisations paysannes et les chefs coutumiers dans la gouvernance foncière.

Ce n’est pas un hasard si la société civile du Nord-Kivu, province de l’est de la RDC, frontalière du Rwanda et de l’Ouganda, s’est engagée sur ce sujet. La terre est en effet au centre de la plupart des causes du conflit qui déchire toute la région. « La question foncière y est plus sensible qu’ailleurs, explique Malembe. Le surpeuplement et la surexploitation des sols, les tensions créées par la présence de populations originaires du Rwanda depuis le début du XXe siècle, les mouvements de réfugiés depuis le génocide de 1994, auxquels s’ajoute l’activité de groupes armés soutenus par le Rwanda, expliquent que la situation du Nord-Kivu intéresse la sécurité nationale. »

Concilier gestion moderne des terres et pratiques coutumières

La nécessité d’une nouvelle gouvernance foncière s’imposait pour remédier à ces problèmes structurels. L’objectif est de concilier la gestion « moderne » des terres, avec les pratiques coutumières, plus proches des réalités locales mais totalement débordées par l’ampleur des problèmes.

Le plaidoyer du Fat a débouché sur la reconnaissance par la loi de comités consultatifs locaux, aux différents échelons décentralisés, composés des chefs coutumiers (propriétaires traditionnels des terres), des organisations paysannes et des associations féminines. Ces comités seront chargés, entre autres, de trancher les conflits fonciers avant qu’ils ne soient soumis, si nécessaire, au système judiciaire.

Le rôle de la commission, où siège actuellement Malembe, est d’élaborer les textes permettant la mise en pratique de la nouvelle loi. Mais elle se heurte à un problème financier : l’État n’a pas toujours débloqué le budget prévu pour son fonctionnement et les agences internationales n’ont pas délié leur bourse. Seuls le CCFD-Terre Solidaire, une fondation italienne et un consortium d’ONG belges l’ont soutenue.

C’est que cette loi contrarie des investisseurs qui convoitent de vastes superficies pour y développer des projets d’agriculture industrielle. Elle leur impose en effet une étude d’impact écologique et social. Plus gênant, des pressions congolaises ont obtenu que les sociétés étrangères investissant dans l’agriculture, soient détenues à 51 % par des nationaux. Cette vision, contraire à l’approche libérale défendue par les agences onusiennes et l’Usaid (Agence américaine pour le développement international), est contrée par un travail de lobbying qui retarde l’application de la loi.

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