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En Bosnie, le tourisme responsable fait naître des espoirs

Publié le 19.07.2018| Mis à jour le 14.01.2022

Doté d’un fort potentiel, la Bosnie se prépare à l’arrivée de vacanciers dans les villages et montagnes autour de Sarajevo. Une dynamique qui permet aux diverses communautés de relever les même défis.


Dominant toute la vallée, le monastère de Fojnica datant de 1864 avec sa magnifique bibliothèque remplie de livres rares a fière allure. Rénové de la tête au pied, il attend les visiteurs, à une soixantaine de kilomètres de Sarajevo. Les quelque 12 000 habitants de la ville aujourd’hui sur le déclin espèrent bien profiter de sa notoriété pour mettre fin à l’exode rural.

Avant la guerre qui a ravagé le pays dans les années 1990, la cité comptait en effet 15 000 habitants. Les prévisions de l’Organisation mondiale du tourisme ont fait naître des espoirs. Car, selon cette institution, la Bosnie fait partie des pays qui devraient enregistrer la plus forte progression du nombre de vacanciers à l’horizon 2020.

La capitale bosniaque bénéficie déjà d’un certain intérêt, et l’insécurité qui règne tant au Maghreb qu’en Turquie a fait de cette destination un refuge pour les visiteurs originaires des pays du Golfe.

« Mais en moyenne, les visiteurs ne restent que deux jours chez nous, avant de poursuivre leur voyage en Croatie, met en avant Almir Pestek, professeur associé à la faculté d’économie de Sarajevo. Il faut leur donner envie de prolonger leur séjour en leur proposant des activités suffisamment attractives. »

Un accompagnement multiforme

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Ici, le potentiel est indéniable : des montagnes magnifiques dans un environnement préservé, une riche tradition culinaire, sans parler des thermes.

En plus de la clientèle locale ou celle originaire des pays de l’ex-Yougoslavie, ils attirent déjà quelques curistes allemands et autrichiens, sensibles à la qualité de l’air mais aussi à des coûts de séjour très bas.

« Pour Fojnica, comme pour les régions enclavées dans lesquelles nous travaillons, le développement touristique, c’est la perspective de recettes supplémentaires. À condition de bien accompagner les porteurs de projets, car pour bénéficier de ces opportunités, le secteur a besoin de professionnels », remarque Sarah Devisme, fondatrice de l’ONG Alterural, partenaire du CCFD-Terre Solidaire, qui appuie les acteurs locaux.

L’histoire remonte à 2007 quand Sarah commence à travailler dans cette région avec Caritas Belgique, la Fondation Abbé Pierre et le conseil régional d’Auvergne sur des projets d’aménagement rural. En 2009, l’association prend son envol. Progressivement, le programme s’étend à d’autres destinations situées dans un rayon d’une heure de transport maximum de Sarajevo.

Depuis, 500 porteurs de projets touristiques ont été aidés pour la promotion de leur offre, plus de 350 familles, membres d’associations et autorités publiques locales ont bénéficié de formations et de voyages d’études dans d’autres régions des Balkans (Herzégovine, Serbie, Slovénie…). Et pour relever le défi , 200 ont reçu des subventions en nature (panneaux solaires, matériaux pour l’extension de terrasse, équipements pour la transformation de produits alimentaires locaux…) d’un montant compris entre 250 et 2 000 euros.

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Demila et Sevala, agricultrices à Fojnica font ainsi partie des heureuses élues. Face à l’hôtel accueillant les curistes, la mère et la fille ont installé un petit stand pour vendre leurs confitures, tisanes et autres liqueurs à base de produits naturels de leur exploitation ainsi que de délicieuses baies et plantes aromatiques directement cueillies dans les forêts avoisinantes :

« Nous avons été conseillées sur la manière de présenter nos produits et nous les avons plusieurs fois exposés dans des foires, ce qui nous a ouvert de nouveaux marchés », expliquent-elles.

À la sortie de la ville, Ivana a elle aussi rejoint le camp des habitants volontaires pour développer de nouvelles activités. Elle a été aidée par Alterural pour acheter du matériel afin de transformer le lait de ses trois vaches en fromage fumé – une spécialité locale – et obtenir le label Agriculture Biologique, signe de qualité qui devrait lui apporter une plus forte visibilité. « Reste que c’est encore très difficile de valoriser ces produits à leur juste prix !, regrette-t-elle. Trop peu de clients sont prêts à payer plus cher… »

Avec leurs chambres et tables d’hôtes mais aussi leur club d’équitation situés à Djeca Vjetra, dans la campagne à une quinzaine de kilomètres de Sarajevo, Edhem Tufo et sa fille Sanja ont déjà franchi les premiers obstacles. Mais pas question pour eux de faire cavalier seul. Bien au contraire : dans le cadre d’un programme soutenu par l’Union européenne, Alterural entend s’appuyer sur ces locomotives pour créer une véritable dynamique.

L’idée est d’organiser ces porteurs de projets touristiques en réseau et d’encourager les échanges d’expériences et de bonnes pratiques. Cette solidarité transcende les communautés. À Fojnica, Bosniaques et Croates, qui représentent respectivement 70 % et 30 % de la population, travaillent comme avant la guerre main dans la main, leur destin est de nouveau lié.
« Ensemble, autour du village de transhumance de Prokosko ils ont balisé des chemins de randonnée », se
félicite Sarah.

Dans la vallée, un directeur d’un complexe hôtelier croate a coiffé la casquette de lobbyiste en chef pour obtenir une loi protégeant les porteurs de projets touristiques, car le secteur n’est pas encore suffisamment réglementé. Et si le pari n’est pas encore gagné, les protagonistes de cette nouvelle histoire en train de s’écrire, regardent désormais tous devant eux et dans la même direction…

Laurence Estival

Aller plus loin sur la Bosnie avec les Échos du CCFD-Terre Solidaire, une émission RCF :

Suite de l’entretien avec Laurence Estival

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